Lorsque l’homme arrivera sur Mars, ce sera dans des conditions « extrêmes » et donc « extrêmement » exigeantes sur le plan des conditions de vie. La facilité (relative !) sera de vivre comme dans un sous-marin, dans l’exiguïté générale et particulière. En organisant les premières missions, il faudra penser à l’environnement interne de la Base car le bien-être mental des premiers résidents martiens dépendra aussi de l’espace à l’intérieur duquel ils se mouvront et vivront, aussi bien des volumes que de l’esthétique et de l’aménagement en général. Lors du dernier congrès de la SFPA (Swiss Flying Physicians Association), mi-juin 2024 à Genève, auquel je participais, nous avons eu un entretien à distance avec la Docteure Jessica Studer qui se trouvait en mission pour l’ESA (y compris l’hiver) dans la base Concordia au centre de l’Antarctique.
La Docteure Studer n’a pas abordé le point que je traite aujourd’hui mais elle nous a fait visiter la base et j’ai été frappé par l’austérité, la fonctionnalité stricte, l’absence totale de préoccupation esthétique sauf quelques très rares objets personnels dans les chambres. Je pense que c’est une erreur et que ce serait un handicap de poursuivre dans cette voie quand on partira pour Mars. La psychologie n’est pas un détail surtout pour des missions qui vont durer 30 mois (Deux fois 6 mois de voyage, 18 mois de séjour sur Mars) donc beaucoup plus que les séjours à Concordia (un an dont 4 mois de nuit totale).
Stanley Kubrick avait compris ce point dans son film « culte » 2001 Odyssée de l’espace. Dans la station spatiale relais (en forme de tore), l’aménagement comme les couleurs étaient soignés, très épurés mais nets et harmonieux, correspondant à l’esthétique moderniste de l’époque. De même, avant une fin « poétique » (que l’on peut interpréter de diverses manières), après que David Bowman a été capturé par la Puissance cosmique, il se retrouve dans un cadre très « haussmannien » qui se veut accueillant et rassurant pour lui, pour l’accompagner jusqu’à une mort accélérée et peut-être une résurrection.
En 2019, nous avons participé, Richard Heidmann (fondateur de l’Association Planète Mars, le membre français de la Mars Society), Tatiana Volkova-Maillard, et moi-même à un « Contest », concours lancé par la Mars Society américaine pour décrire une base martienne de 1000 résidents. Tatiana, polytechnicienne et qui préparait son doctorat à l’EPFL, avait choisi d’imaginer précisément l’aménagement de cette base. NB : Tatiana s’est spécialisée dans la vie humaine au sein des divers environnements spatiaux possibles.
Je donne ci-dessous une traduction de ce qu’elle écrivait, en Anglais, sur le sujet dans notre rapport, rapport qui avait été retenu parmi les cinq meilleurs de la centaine d’équipes participant à travers le monde à ce concours.
Citation :
(In « 6 – ASPECTS ESTHÉTIQUES ET ARCHITECTURAUX »)
…L’architecture de l’ensemble de la structure ou de l’installation dans cette structure doit offrir aux systèmes et aux habitants, sécurité, durabilité et bonnes conditions de vie. Une conception optimisée, compacte, modulaire et flexible est essentielle pour fournir un environnement psychologique approprié. À cet égard, un certain nombre de logiciels intelligents doivent être inclus dans la conception des systèmes d’habitat. Ils seront déterminant pour la qualité de vie et de travail pendant le séjour sur Mars. Cela devrait rendre le fonctionnement de beaucoup de systèmes, possible sans surveillance et assistance continues depuis la Terre. De plus, pour les séjours sur la planète (Mars), il sera important de fournir des concepts de design basés sur la recherche ergonomique…avec intégration d’une métrique anthropomorphique (Volkova T., 2017), qui prennent bien en compte les activités spécifiques des résidents. Leur sécurité pourra en être augmentée.
Pour créer de tels designs, les retours d’expériences de vie dans les environnements extrêmes doivent être pris en compte. En nous basant sur de telles expériences dans les installations orbitales, notamment Skylab, Spacelab, Salyut 7, Mir, la Station spatiale internationale, la navette spatiale, mais aussi les stations de recherche polaires dans l’Antarctique et l’Arctique et les simulateurs de missions spatiales habitées sur Terre, nous pouvons émettre des hypothèses sur le niveau de confort et de sécurité nécessaire pour une colonie sur Mars (Volkova T. Bannova O., 2017). Cependant, nous devons encore approfondir nos connaissances et notre réflexion sur l’adaptation de la locomotion humaine à l’environnement de gravité réduite de Mars. Cela devra apporter de nouvelles perspectives sur notre compréhension des effets physiologiques et psychologiques de la gravité réduite sur les résidents, ainsi que sur l’impact de cette gravité particulière sur l’architecture elle-même.
Comme style principal pour cette colonie, nous proposons le Bauhaus (1919-1933), qui est célèbre pour sa simplicité, sa fonctionnalité et son côté pratique. Avec ce style, nous pouvons combiner les besoins humains et les besoins techniques à l’intérieur des habitats. Il devrait également aider à atteindre l’harmonie entre l’environnement interne et externe. Par exemple, les éléments horizontaux et verticaux devraient être en équilibre, et en même temps, asymétriques, ce qui créerait un sentiment de dynamique à l’intérieur, tout en respectant l’utilisation maximale de l’espace (Figure 2 ci-dessus).
En même temps, nous recommandons d’incorporer judicieusement à l’espace visuel des éléments esthétiques significatifs tels que des scènes de la nature terrestre, en particulier des formes marines et des scènes impliquant de grands espaces ou des vues sur la forêt pour le divertissement, ou des vues panoramiques depuis une perspective élevée, en particulier pour les vues impliquant des plans d’eau (Figure 1 ci-dessus). De plus, l’effet des couleurs et des textures, ainsi que l’éclairage dans la conception intérieure devront être basés sur les expériences scientifiques que nous avons accumulées. Cela peut avoir un impact significatif sur la performance et la psychologie humaines ainsi que sur la gestion des stocks. Par exemple, le jaune, le marron, le rouge et l’orange peuvent être utiles dans les laboratoires, les postes de travail et autres zones axées sur les tâches, tandis que le bleu, le vert et le violet peuvent être appropriés dans les chambres à coucher et les zones de loisirs (Stuster, 1996). L’exposition d’objets personnels et la personnalisation de la décoration ne doivent pas être déconseillées, que ce soit dans les chambres à coucher ou dans les quartiers privés. En revanche, l’affichage d’images sélectionnées individuellement dans les espaces communs est fortement déconseillé.
Fin de citation.
J’ajouterais trois compléments à ces propositions.
D’abord je pense que l’on devrait dès que possible augmenter la hauteur des pièces ou locaux de réunions (pour éviter un effet d’écrasement). Ensuite, on a bien noté dans l’ISS l’importance de la Cupola (dôme vitré), et j’en déduis que l’on devrait ménager à l’intérieur des habitats martiens, une vue sur l’extérieur de la planète dans un maximum de pièces. A cet effet on pourrait installer quelques fenêtres (plaques épaisses de verre laminé) mais pas trop à cause des radiations. La production sur place du verre nécessaire ne devrait pas poser de problème insurmontable car la silice est abondante et accessible au sol de Mars. Dans la plupart des pièces, la vue sur l’extérieur pourrait être procurée via des écrans répercutant en interne les différents points de vue environnants (en prenant en compte les quatre points cardinaux pour restituer la sensation de l’évolution du jour).
Ces ajouts seraient importants pour réduire la sensation d’enfermement (claustrophobie). Bien sûr, plus de volume veut dire plus de gaz respirable et des panneaux de télévision signifient plus d’énergie. On ne pourra sans doute pas offrir ce luxe aux tout premiers résidents mais il faudra y penser très vite. En attendant on pourra poser des miroirs sur les murs pour agrandir visuellement les volumes.
Ces adaptations, surtout l’aménagement des locaux privés dont parle Tatiana Volkova, devront toujours être faites avec le souci de l’hygiène, donc non seulement de l’entretien mais aussi de la facilité de l’accès aux volumes devant être entretenus. Il y va de la santé des résidents. On sait que les « microbes » ne se gênent pas pour se cacher (expérience dans l’ISS) et se multiplier tranquillement avant de pouvoir infecter en force les autres êtres vivants. Il faudra toujours l’avoir présent à l’esprit.
L’homme n’est pas seulement une machine, c’est aussi un être « sensible », qui a des « sentiments ». Il ne peut fonctionner dans de bonnes conditions que si intellectuellement, il se « sent » bien. Il sera très difficile de créer cet environnement confortable et stimulant dans les premiers habitats sur Mars mais il faudra s’y efforcer. On pourra faire voyager et stocker les robots humanoïdes dans des boites mais non les êtres humains (sauf quand ils seront morts). Réfléchissons à ce sujet qui n’est pas du tout négligeable. Les missions habitées ne se résument pas à l’astronautique.
Illustration de titre : éléments de la présentation « Let it be » faite à la Convention internationale de la Mars Society, en Octobre 2019 (University of Southern California), crédit Tatiana Volkova, Association Planète Mars, Mars Society Switzerland.
Thèse de doctorat de Tatiana Volkova (EPFL 2022): “Biomechanics at the workplace under hypogravity conditions”.
Références d’autres études effectuées par Tatiana Volkova-Maillard : https://scholar.google.com/citations?user=ZWtOX0kAAAAJ&hl=en
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Conférence le 22 mars 2025 à l’EPFL, campus de Lausanne: La Chine sur Mars, par le grand spécialiste européen du sujet, Philippe Coué. Marquez la date!
https://memento.epfl.ch/event/conference-la-chine-sur-mars-presente-par-philippe/
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Index L’appel de Mars 25 02 07
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11 réponses
Je pense en effet que dans l’environnement pour le moins difficile que connaîtront les futurs « martionautes », les aspects de confort évoqués dans le blog de ce jour seront d’une très grande importance. Une question psychologique qui n’a pas été (directement) traitée est celle de l’éloignement de la planète d’origine, qui ne sera plus visible que comme un petit point lumineux dans le ciel et avec laquelle plus aucune communication « en direct » ne sera possible. Aucun être humain ne s’est encore trouvé dans ces conditions et on ne sait pas trop quel pourrait en être l’impact sur le psychisme humain à long terme. Dans ce contexte, proposer aux futurs « martionautes » des scènes terrestres, comportant en particulier des éléments aquatiques (cascades, lacs, vues marines … ), sera en effet certainement d’une grande signification. Attention cependant à un possible effet pervers, qui conduirait à augmenter le « mal du pays » au lieu de le diminuer !
Mais avant de vivre sur Mars, encore faut-il y aller. De ce point de vue (comme d’autres), l’actualité aux Etats-Unis me paraît préoccupante. Je soumets le à la réflexion des lecteurs de ce blog la vidéo suivante que l’on vient de me signaler, dont je partage largement les conclusions et préoccupations:
https://youtu.be/kBH4OsVtoaE?si=ztMXYYU_3OJ1KCX6
Le risque est que les Etats-Unis finissent par se retrouver sans plus de programme lunaire (programme Artémis annulé), … et avec un programme martien qui pourrait ne pas aboutir non plus (le Starship n’a pas encore fait la démonstration qu’il pourra effectivement « faire le job »). C’est les Chinois qui vont se frotter les mains ! 🙂
Merci pour ce commentaire, Pierre-André.
Il est vrai que la distance et la difficulté de communiquer de ce fait (décalage de temps) vont être difficiles à vivre. Disons (pour voir les choses du bon côté) qu’on aura le temps de réfléchir à la réponse qu’on pourra donner à une question! Mais je voulais ici parler de l’aménagement intérieur de la Base, non des télécommunications.
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Pour ce qui est du comportement actuel d’Elon Musk, j’ai bien écouté la vidéo dont vous nous avez communiqué le lien. Je comprends bien qu’Elon est un peu perturbé (il y a de quoi!) par les nouvelles obligations qu’il a acceptées. Il est bon de le savoir. Cependant il est trop tôt pour en tirer des conclusions définitives. Je sais qu’il est passionné par les vols habités vers Mars et l’implantation d’une Colonie et je suis certain qu’après avoir remis de l’ordre dans la bureaucratie américaine, comme il a entrepris de le faire, il retournera à son rêve.
J’ai confiance!
Pourrait-on ajouter de la musicothérapie ou du moins une musique occasionnelle apaisante et aussi étudier quels sports seraient les plus profitables non seulement pour la forme physique mais aussi pour la confiance en soi, la prise de conscience de son bon état mental et physique. Même le yoga? Et encore une bibliothèque, une filmothèque qui d’ailleurs pourrait être actualisée (lentement)? Et bien que les contacts avec la terre demandent du temps, il n’est pas à exclure l’envoi de petits films donnant des nouvelles de la famille ou à la famille. D’où nécessité d’une préparation longue avant l’arrivée des martionautes, et intérêt de s’enquérir auprès des personnes qui vivent dans des sous-marins de ce qui serait utile pour aider à un bon moral. Plantes? animaux? poissons?
Merci Martin.
Vous avez raison pour la musique. Rien de plus facile car un morceau enregistré peut être écouté sans gêne avec un décalage temporel. Et puis on aura des datacenters dans lesquels on pourra puiser à volonté. Les films ce sera la même chose, sauf que les images demandent beaucoup plus de mémoire. Il n’y aura peut-être pas stockage mais déchargement lors de périodes creuses.
Les livres c’est moins sûr, à cause de la masse qu’ils représentent, à moins bien sûr qu’on les lise sur tablette.
Autrement, les plantes oui d’autant qu’elles consomment du gaz carbonique, les poissons oui car ils peuvent être contenus dans des aquarium, les animaux non car ils circulent sur leurs pattes et peuvent être vecteurs de zoonoses transmissibles à l’homme (et les transporter depuis la Terre posera aussi un gros problèmes, surtout si on voyage en apesanteur).
La musique est en effet très importante pour maintenir un bon moral (c’est en tout cas totalement vrai pour moi 🙂 ). Les astronautes, de l’ISS en particulier, emportant déjà avec eux, ou peuvent télécharger, des morceaux de musique qui leur plaisent particulièrement, c’est un facteur de bien-être très positif, … et ça ne coûte pas grand-chose (ni en espace, ni en masse)!
Confirmation de chatgpt: « Oui, les astronautes de l’ISS écoutent de la musique ! Ils ont accès à des listes de lecture sur des appareils comme des iPods ou des ordinateurs. La musique est souvent utilisée pour se détendre, améliorer le moral ou aider à se concentrer, surtout lors de tâches longues ou répétitives. Certains astronautes apportent même leur propre musique, tandis que la NASA met à leur disposition des albums variés, allant du rock à la musique classique. ».
Bon dimanche à tous.
Il y a une grande différence entre la cupola sur l’ISS et n’importe quelle vue depuis un endroit fixe où qu’il soit: Depuis ma fenêtre, depuis la Lune, depuis une grotte sur Mars, le paysage ne change pas ou très peu (tempêtes, neige, saisons). Depuis l’orbite terrestre basse, le paysage change très vite et tout le temps! Même en revenant 90 minutes après au-dessus du même endroit, l’éclairage, la couverture nuageuse auront changé.
Avoir la paroi d’une caverne comme vue, n’est pas très différent d’un appartement en face comme c’est le cas d’une partie croissante de la population mondiale.
Je ne suis pas d’accord. Il y a certes une grande différence entre la vue changeante de la Cupola et une vue statique de l’environnement de la base martienne. Mais ce n’est pas du tout comme regarder un mur. Vue de la base sur écran, la vue va évoluer, les ombres vont se rétracter et s’étirer, les couleurs changer, peut-être un tourbillon de poussière (« dust-dévil ») va passer, des nuages dans le ciel, quelques astronautes en EVA évoluant sur le terrain à proximité, un rover pressurisé rentrant à la base, une fusée au décollage ou à l’atterrissage, un nuage de poussière précurseur d’une tempête approchant.
Pour renforcer le sentiment de communauté et limiter le sentiment d’isolement, je préconise d’ailleurs une ou deux (redondance!) séries de capteurs (6 peut-être), posées à deux points stratégiques de la base, plutôt qu’une multitude de capteurs. Ces capteurs pourraient être placés en haut de deux tours (qui pourraient servir à autre chose, les télécom par exemple). A l’intérieur des pièces sans fenêtres les résidents choisiraient les vues qui leur conviennent et partageraient ainsi leurs observations de leur environnement commun.
Seule l’expérience montrera si des vues statiques de l’environnement martien, quand même assez « monochrome », pour ne pas dire monotone, comparé à celui de la plupart des sites terrestres aura oui ou non un effet déprimant à la longue (n’oublions pas que les séjours sur Mars dureront au minimum 18 mois, c’est long!) sur les futurs « martionautes ». J’ai l’impression qu’à choisir une projection sur écran, les occupants d’une base martienne préfèreront assez vite des paysages terrestres au paysage martien, mais ça reste à vérifier.
Concernant les « vues statiques de l’environnement martien » on peut demander aux personnes qui habitent un désert (pas une oasis) de nous dire ce qu’ils en pensent. Oui, regarder des paysages terrestres serait plus agréable… Mais on peut s’interroger sur ce point (?) car ils risquent de déclencher un sentiment de frustration voire d’impuissance. Il se peut que contempler le paysage martien ne soit pas si désespérant que cela surtout si on en tire des richesses. C’est un nouveau monde à explorer. Et les activités ainsi que les contacts avec la terre feront un peu oublier cette monotonie très relative. Il se peut aussi que certains s’y fassent sans problème et que d’autres soient envahis par une nostalgie insurmontable. Je crains qu’un certain malaise soit inévitable dû à l’éloignement de la terre mais c’est bien pour cela que Monsieur Brisson a créé cette page… L’idée de leur donner une vue directe sur l’atterrissage et le départ de fusées, plus encore que leur filmage serait peut-être bonne mais je n’en suis pas sûr pour les mêmes raisons. Le filmage permettrait de donner le choix, la liberté de regarder ou non, d’aller voir en direct ou non.
« … aux personnes QUI HABITENT un désert (pas une oasis) de nous dire ce qu’ils en pensent ». C’est là toute la différence, il s’agit du lieu de vie pour eux « normal », l’endroit où ils sont nés (pour la plupart). Vivre sur une autre planète, dans un environnement hostile et non « naturel » pour des êtres humains, complètement séparés de leurs « frères humains » y compris de leurs proches, sans possibilité de retour, avant de longs mois en tout cas, pourrait faire une grand différence (je parle évidemment de la première génération de « colons » martiens). Mais on ne le saura vraiment que lorsque les premiers martionautes auront vécu sur Mars un certain temps, c’est impossible à simuler de façon réaliste en restant sur Terre. Tout au plus pourrait-on envisager de le faire sur la face cachée de la Lune, avec des communications artificiellement retardées passant par un relai en orbite lunaire. Mais même là, les astronautes sauraient pouvoir rentrer sur Terre en quelques jours si nécessaire, psychologiquement cela change pas mal de choses.
Quant au risque d’une possible accentuation du « mal du pays » par des vues terrestres, j’ai déjà soulevé ce point plus haut.
Il est totalement impossible de prévoir quel sera le moral des gens sur Mars, je suis d’accord et il n’existe pas de situation permettant de le simuler de façon totalement satisfaisante dans un endroit facile d’accès. Pourtant certains tentent cela dans des déserts et avec raison à mon avis. Cela n’exclut pas de faire des hypothèses, d’essayer d’envisager toutes les possibilités. C’est même nécessaire d’autant plus qu’il y a des éléments de diversité comme les différences de personnalité et de leadership, les aléas techniques voire les évènements climatiques. On ne peut pas comparer avec les marins de Christophe Colomb ou les premiers explorateurs européens en Afrique. Ils bénéficiaient de l’atmosphère terrestre. Oui, les derniers pouvaient parler aux Africains, les premiers étaient poussés par la grandeur de leur mission, la valeur de leur capitaine… Quoique! Il y a la certitude de ne pas pouvoir rentrer avant un long délai pour les martionautes comme pour les voyageurs d’autrefois, la lutte contre les éléments, le manque de confort et de sécurité. Bien sûr quand on se lance dans une aventure nouvelle, il existe un risque de très mauvaise surprise. Et même on peut être sûr qu’il y en aura (comme au Far West). Cela n’interdit pas d’essayer de prévoir et même il faut tirer profit de toute expérience un peu similaire. Mais cette question ne sera tranchée que lorsqu’on y sera vraiment sur Mars.