L’IFT9 du Starship qui a eu lieu dans la nuit du 27 au 28 mai, a encore une fois été décevant. Le lanceur Superheavy n’a pu retourner sous contrôle jusqu’à la surface du Golfe du Mexique et le contrôle d’attitude du vaisseau Starship a été perdu dans la descente vers l’Océan Indien. Ce n’est pas que cet IFT (Integrated Flight Test) ait été à proprement parler « raté » car certainement beaucoup de données intéressantes ont pu être collectées. Mais il aurait été bon pour la communication de SpaceX de ne pas vouloir tenter autant d’expériences (voir tableau ci-dessous) et de réussir un retour au sol sans faute, aussi bien pour le Superheavy que pour le Starship (et surtout pour ce dernier).
Tout ne s’est pas mal passé. Le décollage, puis le passage par MaxQ (tension mécanique maximum), la séparation du vaisseau S35 de son lanceur B14-2 et le largage de l’interstage ont été impeccables. Dans cette séquence, tous les moteurs du SuperHeavy, sont resté allumés puis se sont éteints avant de se rallumer quand il le fallait. Le SuperHeavy lui-même était celui qui avait été utilisé pour l’IFT7 et l’un de ses 33 moteurs Raptor Sea Level était également réutilisé. Les moteurs du Starship ont aussi parfaitement fonctionné pour le porter à une vitesse correcte (plus de 26.000 km/h) jusqu’à une altitude suborbitale correcte (au-dessus de 150 km). On avait l’impression qu’on assistait à un « sans faute » et tout le monde (y compris les présentateurs de SpaceX) étaient ravis. Mais…
Mais la suite fut moins brillante.
Un des tests importants était une nouvelle navigation du lanceur lors de son retour sur Terre. Il s’agissait d’économiser de l’énergie en utilisant moins de carburant pour le manœuvrer. Outre une modification de la propulsion pour la rendre plus précise, il s’agissait de le freiner plus efficacement avec l’atmosphère en l’y exposant davantage par son orientation (angle d’attaque plus ouvert). Le début de la descente se passa bien mais le rallumage de 13-1 des moteurs (l’un d’entre eux était volontairement éteint pour tester le cas d’une défaillance) pour assurer le freinage final, s’interrompit immédiatement et le lanceur fut perdu.
Par ailleurs, lorsque le vaisseau tenta d’ouvrir sa porte pour tester le largage de palettes de satellites Starlink, elle ne s’ouvrit pas complètement. On dut la refermer. Le vol suborbital continua un certain temps et ensuite la descente fut amorcée mais il y avait des fuites d’ergols (liées au problème de la porte ?) et le contrôle d’attitude fut perdu au-dessus de l’Afrique. On se retrouvait dans la situation du test IFT3. Le vaisseau fut « passivé » (réservoirs vidangés). Finalement les communications furent interrompues lorsque l’atmosphère devint suffisamment dense.
Lors de l’introduction du vol, les présentateurs de SpaceX ont parlé du premier vol vers Mars à la fin 2026. Plus le temps passe et plus on peut douter que cela soit possible. Heureusement la FAA ne fait plus obstacle aux lancements (25 autorisés récemment) et les tests pourront se multiplier. Mais on peut quand même s’inquiéter.
Illustration de titre: le Starship 35 en majesté, au début de son vol suborbital, après coupure de ses moteurs (« SECO »). Jusqu’ici tout va bien. Crédit SpaceX (capture d’écran).
Illustration ci-dessous, présentation du programme IFT9 (voir référence en bas du tableau).

Lien:
commentaire de Space.com sur l’IFT précédent :
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18 réponses
Bonjour Pierre Brisson
Oui j ai assiste a tout cela: c est bien parti mais cela s est moins bien termine…un peu decevant mais c etait un vol destine a tester beaucoup de choses donc pas tres etonnant. ca fait deux fois que la porte ne s ouvre pas.et ca fait deux fois que nous avons une fuite.
.
la mise au point est difficile ce qui n est pas surprenant. Toutefois comme Elon Musk ainsi que la patronne de SPACE X le soulignent un certain nombre de points semble regles comme le reallumage de moteurs ainsi que les tuiles thermiques…Pour ce qui est de l inclinaison de super heavy lors de la descente bon la faut voir !il semble y avoir une volonte de diminuer la consommation de carburant … ce qui pourrait vouloir dire que c etait un peu limite lors des vols precedents.
c etaient « quoi » ces trucs qui se promenaient dans la soute ?des cristaux de glace… de carburant…?
Il est dommage que l on soit oblige de faire exploser les vaisseaux car on ne peut pas recuperer les morceaux pour les expertiser comme l on fait en cas d accident d avions…
Certes mais il semble que le vaisseau comme le lanceur soient truffés de capteurs et de caméras, le tout étant relié au réseau Starlink. Les données sont ainsi communiquées instantanément à SpaceX.
Probablement du carburant puisque l’on a su après qu’il y avait une fuite.
Tout semble indiquer que les Starship va devoir suivre le processus de la Falcon 9: assurer la mise en orbite dans tous les cas, et considérer la récupération du Starship comme un objectif pour plus tard. La récupération du booster doit être fiabiliser très rapidement et les optimisations laissées pour le future également.
Les essais de tuiles thermiques avec refroidissement actif et autres systèmes nécessaires à la récupération du Starship doivent être repoussés pour tester le plus rapidement la mise en orbite et les essais de transferts d’ergols en orbite, qui a perdre une dizaine de Starships dans le processus.
Merci de votre commentaire, Monsieur Rerat. Je suis d’accord avec vous sur la nécessité de parvenir le plus tôt possible à la mise en orbite et surtout au réapprovisionnement du Starship en ergols en orbite.
Cependant la récupération et la réutilisation seront nécessaires également pour atterrir et repartir de Mars (sans compter que le coût de la non-récupération ferait monter le prix d’un voyage vers Mars à un niveau prohibitif pour y installer une colonie).
Bonjour
Apparemment ELON MUSK parle de la version 3 de la fusee(124.40m hauteur) et aussi de la version 4 qui devrait suivre(142 m dont 61 starship et 81 m lanceur): on approche de ce dont nous parlions il y a quelques mois.
oui bien sur : pour Mars il s agit d etre certain que tout fonctionne bien sinon c est la cata!
Pour voyager 1 on peut faire la même remarque que Monsieur Niogret: il faut que tout fonctionne bien.
https://www.lemonde.fr/sciences/article/2025/05/27/la-nasa-reussit-a-rallumer-un-des-propulseurs-de-voyager-1-apres-vingt-et-un-ans-d-inactivite_6608751_1650684.html
Mais toutes les actions sur cet appareil remplissent d’espoir. Les Américains sont en train d’apprendre par essais et erreurs. Qu’un engin aussi ancien parvienne à être encore relativement opérationnel fait penser que la prochaine machine conçue pour quitter le système solaire sera bien meilleure. Aller vers les étoiles semble de moins en moins impossible… à condition de résoudre le problème des radiations en tous genres (HZE…). Et là, malheureusement, à moins d’inventer un alliage qui leur serait totalement imperméable, je ne vois pas comment l’homme y survivrait sauf à changer sa biologie? (muscles, équilibre, vue, reins, os, étudiés avec l’ISS). Voir les recherches sur l’ADN des tardigrades ou autres. Bien sûr, ce sera un voyage de plusieurs générations. Très dommage que l’Europe ne soit pas de la partie! On me rétorquera qu’on manque d’argent mais l’argent est une question de choix, de faire les bons choix en sacrifiant un peu le reste. Et aussi de manque de motivation, de manque de passion. Les Européens semblent ne pas discerner la nécessité d’aller dans l’espace lointain pour les richesses minières, l’accroissement des connaissances, de la créativité et tout simplement la survie à long terme. D’où l’extrême intérêt de ce blog pour mieux motiver certains.
Je ne mettrais de loin pas en premier « les richesses minières », un but assez mercantile, alors que sur notre Terre on n’a pas exploré et encore moins exploité notre sol à plus de quelques kilomètres de profondeur. Nous avons encore suffisamment de ressources juste sous nos pieds sans devoir aller les chercher à des milliards de kilomètres.
L’Europe ne manque pas de visions, elle est réaliste, car le Système solaire est actuellement, et encore pour beaucoup de décennies, une cible suffisante et techniquement accessible. L’accroissement des connaissances reste un moteur indispensable de l’exploration spatiale et nous avons bien du pain sur la planche pour mettre en oeuvre notre créativité, et certainement avec passion, durant bien des décennies d’exploration ici même.
Merci, monsieur de Reyff, pour votre réponse. Vos arguments sont extrêmement raisonnables. Trop? Je me demande dans quel état d’esprit étaient les gens qui ont lancé les Voyagers ou tout simplement ont réalisé les voyages sur la lune. Comme vous l’écrivez, on pouvait apparemment s’en passer… apparemment. Oui, tout cela nous a peu rapporté jusqu’ici, mis à part le prestige pour les US et surtout un peu d’exaltation dans ce monde étriqué. On peut aussi s’interroger sur la manière dont se réalise le progrès humain: à l’aveuglette presque, dans des directions nombreuses et diversifiées avec un espoir mêlé de doutes énormes. L’esprit d’aventure est davantage dans l’ADN des Américains et certainement que l’attrait de l’inconnu était en numéro un dans leur esprit. Les Européens l’ont un peu perdu après 1945. L’envie de trouver des richesses minières, je l’admets bien volontiers, n’est qu’une des tentatives à posteriori pour justifier toutes ces dépenses et prises de risque.
Il faut rappeler que, initialement, les deux sondes Voyager ont été lancées (5 septembre 1977 pour Voyager 1 et 20 août 1977 pour Voyager 2) et planifiées pour étudier de près Jupiter (5 mars et 9 juillet 1979), Saturne (12 novembre 1980 et 26 août 1981) et Titan (12 novembre 1980) et ensuite seulement Uranus (24 janvier 1986) et Neptune (25 août 1989). Ce n’est qu’après le succès des survols planétaires de Jupiter et Saturne que la Nasa a décidé de poursuivre la mission de Voyager 2 vers Uranus et Neptune, et encore seulement ensuite qu’il a été décidé de poursuivre l’étude du milieu des régions externes du Système solaire jusqu’à ce jour. Voilà donc pour l’état d’esprit des gens qui ont lancé ces sondes il y a 48 ans.
Par contre, je ne crois pas avoir écrit « qu’on pouvait apparemment s’en passer ». Pas du tout !
Qu’entendez-vous par « nous rapporter » ? Sinon une moisson de mesures, encore sources d’études et de publications scientifiques 40 ans après les expériences faites alors. Votre jugement me semble, hélas, très désabusé. Je n’y souscris pas du tout. Et non, le développement et le progrès humain ne se font pas « à l’aveuglette ». La question n’est pas dans un esprit d’aventure pour l’aventure, mais dans celui de compréhension de notre Univers. À mon avis, il n’y a que des « pas », modestes à faire, continûment et logiquement. Les Européens n’ont pas moins que les Américains un attrait pour l’avancement de la connaissance. Là est le fond de la question.
Il faut remarquer que les Européens ont moins moyens financiers que les Américains, que beaucoup de chercheurs nés en Europe rêvent de travailler aux US. Je crois que le progrès se fait par essais et erreurs, sinon les expérimentations seraient-elles nécessaires? Les voyages dans l’espace nous ont peu rapporté jusqu’ici. Oui, ce n’est pas précis: je veux dire qu’on n’a pas encore ramené beaucoup de minerais extraterrestres sur terre pour fonder une industrie. Mais c’est sûr que cela nous rapporte des connaissances nouvelles. Et avec l’accroissement de la population assez probable, il faudra plus de ressources pour nourrir les gens, assurer les innovations technologiques sans parler le désir de gagner des parts de marché, de réarmer certains pays. Et si des colonies s’installent sur Mars il en faudra encore plus.
La Chine multiplie les essais de toutes natures ….
Comme déjà dit, je ne crois pas qu’on ait besoin de chercher ailleurs dans l’espace et de disposer de minerais extraterrestres qui, du reste, sont de même nature chimique que les nôtres sur Terre. Les immenses ressources ici bas sont bien plus à notre portée (*). Il ne faut pas confonde « réserves », limitées statistiquement par nos explorations minières, et « ressources », proprement incommensurables, car on n’a pas encore envisagé de dépasser la mince pellicule de quelques kilomètres sous la surface terrestre.
D’autre part, qu’est-ce que dix futurs milliards d’habitants sur une planète de 510 millions de km2, dont 30% de continents, moins encore 10% de glaciers, soit 102 millions de km2 ? Une densité de moins de 100 habitants par km2. Imaginons tous ce monde serré comme dans un métro parisien, soit à jusqu’à 7 personnes par m2, paraît-il ; cette foule occuperait une surface de 1’428 km2, soit seulement à peine 2,5 fois la surface du lac Léman (581 km2). Cela est invisible depuis la Lune.
La question est de savoir si les besoins énergétiques de cette future population doivent être au niveau actuel de ceux des Américains, 280 GJ/an par tête, ou des Suisses, 130 GJ/an par tête, la moyenne mondiale actuelle étant de seulement 77 GJ/an par tête, cela pour une consommation mondiale actuelle de 620 EJ/an.
En regard, le Soleil nous gratifie en seulement une heure et vingt-cinq minutes d’autant d’énergie.
(*) Il y aussi 35 millions de tonnes d’uranium comme ressources estimées (cela sans compter 4,6 milliards de tonnes dissoutes dans les océans), soit, avec la future Génération IV du nucléaire (qui pourra utiliser aussi U238 et pas seulement U235), de quoi disposer d’au moins 10’000 ans (voire 1,3 million d’années) à raison de la consommation d’électricité actuelle de 30’000 TWh/an. Et je ne parle pas des ressources en thorium (Th232), quatre fois plus élevées. Nous avons amplement ce qu’il nous faut sur Terre !
Ne visons donc pas l’espace en premier lieu pour d’hypothétiques ressources minérales à acquérir à grands frais, mais, de façon sensée, plus modestement pour enrichir notre savoir.
Bonjour Christophe de Reyff
Quelles solutions peut on envisager pour envoyer des sondes rapides vers l heliopause? quelque chose comparable a breaktrough starshot est il envisageable ?
À lire la liste impressionnante des points critiques à résoudre (« Difficultés techniques »), je pense que ce projet est (encore) totalement du domaine de la SF :
https://fr.wikipedia.org/wiki/Breakthrough_Starshot