Au début, il n’y a pas si longtemps au regard de l’histoire, l’astronome ne disposait que de l’intensité de la lumière et de ses propres yeux pour tenter de comprendre les astres qu’il contemplait la nuit. Après une série de progrès dans la réflexion scientifique et de progrès technologiques, les instruments dont on dispose aujourd’hui pour décomposer la lumière, les spectroscopes, sont devenus extraordinairement raffinés. Grâce à eux on peut non seulement analyser la lumière des étoiles proches mais aussi les atmosphères d’exoplanètes qui n’émettent aucun rayonnement visible ou connaître la vitesse d’éloignement, donc la distance, à laquelle évoluent les galaxies les plus lointaines.
C’est grâce à ces instruments merveilleux que nous avons pu passer de l’astronomie à l’astrophysique.
Pour que la Science ait pu avancer, il a fallu des hommes qui comprennent que les silex pouvaient devenir des outils plus efficaces s’ils étaient taillés ou, plus généralement (et récemment !), qui puissent concevoir des instruments en fonction des effets dont ils voulaient comprendre les causes.
Dans le domaine considéré aujourd’hui, le premier de ces hommes fut Isaac Newton. En 1672 il décrivit avec tous les détails nécessaires à la compréhension et à la répétition, son expérience du prisme, démontrant que la lumière « blanche » (ou « neutre ») était constituée de toutes les couleurs que l’œil humain pouvait discerner. Il constata à la sortie du prisme « un mélange hétérogène de rayons différemment réfrangibles », ce mélange étant ce qu’il appellera lui-même un « spectre ». En langage scientifique on dit aujourd’hui que la lumière blanche est la résultante de radiations de fréquences différentes et que le prisme en réalise la décomposition spectrale. Mais la description moderne était déjà implicite dans les termes employés par Newton. La porte permettant d’accéder au progrès dans cette branche de la Science avait été ouverte !
C’est ensuite au début du XIXème siècle que William Herschell puis Johann Ritter perçurent la présence de rayonnements non visibles de part et d’autre du spectre lumineux et en 1864 que James Maxwell comprit que la lumière résultait, tout comme le son qui fut étudié en premier, d’une vibration électromagnétique. On réalisa ainsi que le spectre lumineux n’était seulement qu’une toute petite partie du spectre électromagnétique qui, dans toute son ampleur s’étendait de part et d’autre jusqu’aux limites des possibilités physiques d’oscillations, des plus courtes au plus longues, des plus rapides au plus lentes ou des plus serrées aux plus ouvertes, selon l’image que l’on préfère pour se le représenter.
Du côté des instruments, le spectroscope de Newton, un simple prisme, évolua considérablement également à partir du début du XIXème siècle. La première évolution fut de placer une lentille-collimateur avant l’arrivée du flux lumineux sur le prisme, pour le rendre parallèle et orthogonal au plan du prisme défini par sa hauteur. La seconde fut de remplacer le prisme par un « réseau de diffraction » c’est-à-dire une surface opaque percée de raies étroites qui produisait le même effet tout en donnant une image plus nette. Ce fut l’idée de l’Américain David Rittenhouse en 1786 (avec des cheveux !) puis du maître verrier/opticien bavarois, Joseph von Fraunhofer en 1815 (avec des fils métalliques). On parla de « réseau en transmission ». Mais la diffraction n’empêchait pas les interférences ; on ajouta donc un autre prisme après le réseau pour éviter la superposition de deux franges de longueurs d’onde voisines. On peaufina par la suite le « réseau » avec une surface de réception composée d’une multitude de petits plans inclinés (constituant des rayures ou, mieux dit, un « réseau en réflexion ») ou en croisant deux réseaux de diffraction afin d’obtenir une multitude de points (plutôt que de fentes ou de rayures) apportant chacun son information sur la lumière reçue (cf MUSE ci-dessous).
Une autre évolution concerne l’interprétation de la lumière reçue par le spectroscope. Fraunhofer remarqua les discontinuités sombres présentes sur tout spectre de lumière solaire (les « raies de Fraunhofer »). Mais ce n’est qu’en 1849 que Léon Foucault (le Foucault du pendule !) réalisa que ces raies correspondaient à l’absorption par la lumière d’un élément chimique, présent dans l’émetteur lui-même ou dans l’atmosphère traversée (ce dont on ne s’aperçut qu’un peu plus tard) et qui annulait en quelque sorte l’émission sur la longueur d’onde de l’élément chimique concerné. En 1859 Gustav Kirchhoff remarqua que la source émettrice devait être plus chaude que la lame du réseau qui l’absorbe (d’où beaucoup de difficultés pour obtenir les spectres de rayonnements lointains et très froids). C’est le début de la découverte d’un nombre extrêmement élevé de raies qui permettent d’identifier très précisément une multitude d’éléments chimiques (simples ou composés) par leur longueur d’onde et par leur position par rapport aux autres raies, un outil extraordinaire pour l’exploration spatiale car il est devenu extrêmement précis.
Une autre évolution concerne l’impression de l’image reçue (à fin de conservation et de comparaisons). Au sortir d’un spectroscope, il faut un spectrographe (que souvent on ne distingue pas du spectroscope) pour capter l’image du spectre et obtenir un spectrogramme (le document). On est passé du simple dessin transcrivant la vue sur écran, à l’impression photographique en noir et blanc puis couleur, et enfin à la capture du rayonnement reçu par capteur CCD (Charge Coupled Device), une matrice de photodiodes extrêmement petites, quelques micons, ce qui permet une précision extraordinaire, évidemment utilisée jusqu’à l’extrême pour décomposer les rayonnements les plus faibles du fait de leur distance ou de leur abondance.
L’un des premiers « développeurs » (dirait-on aujourd’hui) du spectroscope pour l’astronomie, fut le père jésuite italien Angelo Secchi (1818 – 1878) qui inventa le premier appareil spécialement conçu pour décomposer en raies la lumière des étoiles (et non plus seulement celles du Soleil, sur lequel il travailla principalement). Il utilisa cet instrument à partir de 1863, ce qui lui permit de publier en 1870 une classification en quatre couleurs des quelques 4000 différentes sources observées en les rapprochant des éléments chimiques dominant dans leurs raies spectrales.
On était alors dans le cadre d’un Univers que l’on pensait statique mais une autre porte fut ouverte en 1868 quand l’astronome britannique William Huggins, réalisa que le décalage vers le rouge du spectre de l’étoile Sirius, par rapport à celui d’autres étoiles, était explicable par le déplacement (effet Doppler-Fizeau ou « redshift » confirmé en 1848 par Hyppolyte Fizeau après sa découverte en 1842 par Christian Doppler) et il en conclut naturellement que l’intensité et le sens du décalage pouvait servir à calculer la vitesse radiale des astres. Le Vaudois Charles Dufour se servit de cette découverte pour calculer des parallaxes à des distances jamais tentées, à partir des bases constituées par le rayon de rotation des étoiles doubles (avec la Terre et non plus l’astre, comme pointe de l’angle) ainsi qu’il l’expose dans le bulletin n°10 de la Société Vaudoise de Sciences Naturelle en 1868 : Au sein du couple d’une étoile double, la variation de vitesse indiquée par l’effet Doppler va permettre de calculer l’orbite de l’« étoile satellite » autour de l’étoile principale, donc son rayon. Ceci à condition bien sûr que la lumière des deux étoiles du couple puisse être dissociée l’une de l’autre (ce qui limite la distance à laquelle on peut utiliser le calcul). On aura ainsi la base du triangle, dont on pourra mesurer le côté de l’angle au sommet duquel se trouve la Terre en prenant la tangente de l’angle lié à cette base.*
*Lire mon article sur le sujet, dans le Bulletin de la Société Vaudoise de Sciences Naturelles (Vol 99, 2020, pages 130 et suivantes) : « Un Vaudois contributeur majeur à l’astrométrie moderne ».
Cette utilisation de l’effet Doppler sur le spectrogramme se faisait dans la continuation des calculs de parallaxe pour estimer la distance des astres de notre environnement plus ou moins proche. Mais avec la multiplication des observations dans un volume d’espace de plus en plus grand, permises par des télescopes de plus en plus puissants, on remarqua au début du XXème siècle (1929, Hubble) que les galaxies étaient affectées d’un redshift d’autant plus élevé que leur distance à notre Voie Lactée était grande. L’estimation de la distance calculée jusque-là par d’autres moyens, les « chandelles standards » (supernovas de « type Ia », entre autres), pouvait désormais être faite (ou confirmée) par le redshift (ce qui était d’ailleurs la seule solution pour les sources de rayonnements les plus lointains). C’est cette constatation qui permit à l’abbé Lemaître, en remontant le temps, d’en déduire (1931) que l’Univers était en expansion ou plutôt de relier cette constatation à sa théorie plus ancienne (1927) de l’« atome primitif » qu’il avait élaborée à partir de considération théorique (et de calculs) reposant sur la structure de l’atome et les rayons cosmiques.
Depuis, on précise et on raffine sans cesse. Le dernier instrument en date, MUSE (Multi Unit Spectroscopic Explorer)*, en service depuis 2014, est placé sur un des télescopes du VLT (Very Large Telescope) de l’ESO (European Southern Observatory). C’est une application surtout intéressante pour l’observation des sources lumineuses les plus lointaines. Par croisement des réseaux, il apporte une vision différenciée et simultanée de chaque point de lumière. On obtient ainsi non seulement une image ponctuelle, mais aussi, grâce à l’effet Doppler-Fizeau, une vitesse d’éloignement, l’orientation du mouvement et encore un spectre donnant la composition chimique du point observé. En même temps, on obtient une vue simultanée des autres sources lumineuses (et de leurs spectres) comprises dans le champ (on parle de « spectroscopie intégrale de champs »). Cela permet d’obtenir directement une véritable carte physico-chimique immédiate du ciel en 3D.
*Mais il y en a d’autres ! J’aurais aussi bien pu me référer à l’observatoire Gaia et ses deux télescopes dotés de spectroscope, lancé en 2013 au point de Lagrange Terre-Soleil L2 pour cartographier en 3D les étoiles proches.
Nous voyons donc là, un cheminement scientifique typique, fruit de beaucoup de réflexions, de travaux et de calculs, effectuées dans divers domaines (physique, acoustique, optique, chimie, maîtrise de l’énergie, travail du ver et du métal, cryogénie, informatique) et qui parviennent à un résultat synthétique, un outil extraordinaire d’observation des étoiles les plus lointaines, dans leur contexte, permettant l’analyse la plus fine de la source et de son environnement. A toute époque, la Science, dans un domaine quelconque, est le fruit de progressions à partir d’un état antérieur et finalement d’une convergence avec les progressions effectuées parallèlement dans d’autres domaines, sans oublier toujours les mathématiques qui sont au-delà de la logique, la solution pour décrire sérieusement et précisément des phénomènes théorisés et observés (comme l’écriture est indispensable pour la littérature) et le socle sur lequel on s’appuiera pour réaliser ensuite d’autres progrès.
Illustration de titre : le spectre électromagnétique, crédit Wikipedia, creative commons.
Illustration ci-dessous : raies spectrales d’absorption dans le spectre optique d’un superamas de galaxies lointaines (panneau du haut) par rapport à un objet proche, le Soleil (panneau du bas). Les flèches indiquent le décalage vers le rouge. Crédit : Georg Wiora.
liens:
https://journals.openedition.org/bibnum/743
https://fr.wikipedia.org/wiki/Raies_de_Fraunhofer
https://fr.wikipedia.org/wiki/Spectroscopie
https://fr.wikipedia.org/wiki/Spectrographe
https://en.wikipedia.org/wiki/Optical_spectrometer
https://fr.wikipedia.org/wiki/Spectroscopie_%C3%A9chelle
Réunion de la Mars Society Switzerland
Je vous rappelle que j’organise le 18 octobre entre 16h00 et 18h00, à Neuchâtel, une réunion de l’association Mars Society Switzerland. A cette occasion nous avons ouvert la porte aux lecteurs de ce blog en les invitant à se joindre aux membres après que nous aurons traité les sujets relatifs à l’association, soit à partir de 16h45 (précise). Il n’y a pas obligation d’adhésion.
Ce sera l’occasion d’écouter une présentation sur l’étude de faisabilité d’un dirigeable dans l’atmosphère martienne, avec les étudiants de l’EPFL qui ont effectué cette étude l’an dernier, sous le contrôle de Claude Nicollier et de moi-même. Ce sera l’occasion de discuter de ce sujet et aussi d’échanger de façon générale sur les questions d' »exploration spatiale » (au sens de ce blog) qui vous intéressent.
Si vous voulez participer, il est important de me le dire dans les jours qui viennent (jusqu’à ce jeudi 21 septembre). En effet il nous faut estimer cette semaine le nombre de ceux qui seront présents physiquement afin de réserver la salle de réunion adéquate. Merci de votre compréhension.
Adresse mail: mars.society.switz @ gmail.com
XXXX
Pour (re)trouver dans ce blog un autre article sur un sujet qui vous intéresse, cliquez sur (cet index reprend l’intégralité des articles publiés dans le cadre de la plateforme letemps.ch ) :
Index L’appel de Mars 23 08 22
Et, si vous aimez, abonnez-vous! Ce sera pour moi un encouragement à continuer ce blog.
37 Responses
Bonjour Monsieur BRISSON
Exellent survol de la spectro: c est pour cette raison que j ai ete decu d apprendre que OUMUAMUA n avait pas ete etudie sur ce plan !
En ce qui concerne l effet Doppler le theorie de la « fatigue » de la lumiere refait surface en ce moment suite aux observations recentes de galaxies tres tres lointaines dans le temps et dans l espace et cela conduit les auteurs a penser que l univers serait beaucoup plus age que l age fourni par la theorie standard cosmologique … mais dans le fond mis a part l age cela ne change pas grand chose finalement?
Les longueurs d’ondes des premières émissions de photons (surface de dernière diffusion) s’étirent naturellement du fait de l’expansion de l’Univers. Je ne pense pas qu’il faille jeter les estimations actuelles de l’âge de l’Univers à la poubelle. Il y a trop de recoupements qui donnent 13,8 milliards d’années pour que ce ne soit pas « solide ».
Bien d accord :les donnees actuelles sont solides.
Pierre
Pourriez vous SVP développer ces découvertes faites dans l’infrarouge, je n’ai pas accès à l’article pour abonnés.
Merci Serge
https://www.letemps.ch/sciences/les-surprises-galactiques-du-telescope-james-webb
C’est un sujet qui « interpelle » mais je ne veux pas y répondre avant de m’être sérieusement documenté. Outre celui du Temps, je vais lire l’article publié dans ArXiv et vous en reparle.
Merci, impatient d’en savoir.
Je m’éloigne du sujet d’aujourd’hui mais il y a peut-être un moyen de contrer les effets de la microgravité par un médicament:
https://interestingengineering.com/science/smart-molecule-space-microgravity-bone-loss?utm_source=Reddit&utm_medium=content&utm_campaign=organic&utm_content=Sep18
espoir sérieux ou utopie?
@ Serge
Pour répondre, en partie du moins (en me limitant à environ 4’700 caractères d’une page A4 !), à votre question concernant les mesures attendues en spectroscopie infra-rouge, il faut rappeler quelques éléments. Plus on regarde des objets lointains, profondément dans l’Univers, plus on regarde des objets anciens, mais jeunes dans leur âge propre. Du fait de l’expansion de l’Univers, ces objets étaient là où on les voit maintenant, à leur âge. Mais, actuellement (et s’ils existent encore ?), ils sont bien plus éloignés et même à tout jamais hors de portée de nos futures observations, ayant depuis franchi de loin la distance dite de Hubble (celle ou la vitesse de récession, donc la vitesse d’expansion de l’Univers, atteint et dépasse ensuite la vitesse de la lumière), sortant ainsi inéluctablement de notre horizon observable. Les objets profonds observés sont des galaxies jeunes, formées peu de temps (quelques centaines de millions d’années) après le Big-bang.
De fait, en observant l’Univers dit profond, et grâce au fait que la vitesse de la lumière est finie, on se trouve dans une situation analogue à la géologie, on peut scruter simultanément des couches de plus en plus anciennes et des astres de plus en plus jeunes, pour ne pas dire primitifs. Les observations télescopiques et spectroscopiques depuis la Terre se font dans le domaine visible. Le domaine infra-rouge des plus grandes longueur d’onde n’est accessible que depuis l’espace.
Le fameux décalage vers le rouge, le « redshift », noté « z » (par définition, c’est la différence de longueur d’onde, soit la longueur d’onde observée moins la longueur d’onde de la source, divisée par la longueur d’onde de la source) est provoqué par la vitesse radiale due soit à un mouvement propre d’éloignement entre la source et l’observateur, soit à l’expansion-même de l’Univers, de l’espace, c’est-à-dire, l’élongation du « tissu » lui-même de l’Univers, entre la source et nous, les deux effets se combinant. Les mouvements propres ne sont pas négligeables, de l’ordre de plusieurs centaines de kilomètres par seconde, aussi bien transversalement sur le ciel que radialement dans notre direction (décalage vers le bleu), ou dans la direction opposée (décalage vers le rouge). Par exemple, la proche galaxie d’Andromède (située à 2,52 millions d’années-lumière) se rapproche de notre Galaxie à 120 km/s ; mais il y a aussi un mouvement propre de notre Galaxie et surtout la vitesse du Soleil de 220 km/s en rotation dans notre Galaxie ; ce qui fait que, actuellement, Andromède semble foncer sur nous à 300 km/s, donc avec une vitesse radiale négative. Par contre, sa vitesse transversale sur le ciel est modeste avec seulement 17 km/s.
Pour les galaxies plus lointaines — celles situées hors de notre Groupe Local d’une soixantaine de galaxies proches, liées gravitationnellement (soit une sphère d’influence gravitationnelle d’environ une dizaine de millions d’années-lumière de diamètre)–, toutes les vitesses radiales sont positives et s’élèvent vite à plusieurs milliers de km/s. Par exemple, la galaxie M87 est située à 53,5 millions d’années-lumière de nous et semble s’éloigner à une vitesse de 1’284 km/s. Son « redshift » est encore modeste : z = 0,004283. Depuis la Terre, on peut difficilement mesurer des éloignements ayant un décalage de plus de z = 1 (une raie bleue à 500 nm devient une raie infra-rouge à 1’000 nm), soit des objets situés à environ 8 à 9 milliards d’années-lumière ; ce qui signifie que les longueurs d’onde de la lumière observée sortent déjà du domaine visible (380 à 780 nm). Mais les galaxies du ciel profond, donc bien plus lointaines et bien plus rapides, ont des z de plus en plus grands, allant jusqu’à plus de 13 pour les plus lointaines (et donc les plus jeunes !). Il découle que leurs lumières sont entièrement dans l’infra-rouge (selon les astronomes, on distingue : IR proche de 0,7 µm à 2,5 µm, voire 3 µm, IR moyen de 2,5 µm à 25 µm, voire 40 µm, IR lointain de 25 µm à 3,5 mm, voire 5 mm). Il faut donc les observer depuis l’espace, car les « fenêtres » possibles de l’atmosphère terrestre en infra-rouge sont seulement entre 3 µm et 5 µm et entre 8 µm et 14 µm. Le télescope JWST va observer une profondeur cosmique encore jamais atteinte, avec une spectroscopie élargie entre 0,6 µm et 28 µm. La galaxie HD1, parmi les plus lointaines connues, a un z = 13,3 et est (était !) à une distance de 13,5 milliards d’années-lumière. La vitesse d’expansion à cette distance est colossale, près de 297’000 km/s. Mais il ne faut pas utiliser ici la formule simple : v = z c qui n’est valable que pour les très petites valeurs de z, bien en-dessous de 1 ; il faut recourir à la relation exacte issue de la théorie de la Relativité qui donne bien v = 0,99 c !
Merci, vraiment passionnant et complexe pour les profanes.
Comment pouvez vous affirmer:
…donc la vitesse d’expansion de l’Univers, atteint et dépasse ensuite la vitesse de la lumière), …
Avons nous des preuves de dépassement de la vitesse de la lumière?
Je croyais impossible, mais des modèles théoriques le suggère?
Certes, toute masse dans l’espace ne peut pas dépasser la vitesse de la lumière, car son inertie devrait devenir infinie, mais l’espace lui-même peut se dilater indéfiniment. C’est de cela qu’il s’agit dans l’expansion de l’Univers. La phase d’inflation primordiale à partir du Big bang s’est aussi faite à des vitesses supraluminiques. On revit actuellement aussi une sorte d’inflation qui accélère la vitesse d’expansion. Les objets très lointains vont peu à peu sortir de notre horizon de visibilité au moment où leur vitesse va franchir celle de la lumière. C’est finalement l’espace qui les contient qui s’éloigne et les entraîne avec lui.
J’ai demandé à BARD des explications, ci-dessous la réponse (vous devez être inscrit sur Google pour lire le raccourci) :
La théorie du Big Bang est un modèle cosmologique qui décrit l’évolution de l’univers depuis un état initial très dense et chaud. Selon ce modèle, l’univers a commencé à se dilater et à refroidir il y a environ 13,8 milliards d’années.
La vitesse des premières galaxies est un sujet complexe qui fait l’objet de recherches actives. Selon les observations, les galaxies les plus lointaines se déplacent à des vitesses très élevées, parfois supérieures à la vitesse de la lumière.
Il existe deux explications possibles à ce phénomène. La première est que les galaxies se sont formées à partir de matière qui était déjà en mouvement à des vitesses élevées. La deuxième est que l’expansion de l’univers a entraîné une accélération de la vitesse des galaxies.
La phase d’inflation primordiale est une période très courte de l’évolution de l’univers, qui a eu lieu environ 10^-32 secondes après le Big Bang. Pendant cette période, l’univers a connu une expansion exponentielle, à une vitesse bien supérieure à la vitesse de la lumière.
SUITE: https://bard.google.com/chat/fdb331bcd65517db
Non, les galaxies ne se « déplacent » pas à des vitesses supérieures à c !
Les vitesses de récession ne sont pas dues à un mouvement propre. J’ai bien souligné la différence.
Faudra informer BARD! 😄
Bard peut se tromper; tout dépend de ce qu’on lui a mis dans la tête.
.
Pour ce qui est de la limitation par la vitesse de la lumière, tout ce qu’écrit Christophe de Reyff me semble clair. Il ne faut pas rêver de vitesse supraluminique pour tout ce qui comporte une masse. Dépasser la vitesse de la lumière, pour ce qui est des astres les plus lointains, vient simplement du fait que le tissu même de l’Univers se distend et que la vitesse de cette distension s’ajoute à la vitesse propres des astres les uns par rapport aux autres résultant du Big-Bang. Dans un univers immobile, aucune galaxie pas plus qu’aucun neutrino ne pourrait franchir la vitesse de la lumière.
oui et tout repose sur l analyse du redshift qui lui meme peut avoir plusieurs raisons : dilatation cosmologique , vitesse reelle de fuite (DOPPLER) , courbure de l espace temps ; ce que nous mesurons semble etre la resultante de ces phenomenes. Mais les mesures sont incritiquables.
Au risque de me répéter, il n’y a que pour les étoiles de notre Galaxies et pour certaines galaxies du Groupe Local pour lesquelles on peut aussi mesurer un blueshift dû à un mouvement propre orienté vers nous, tout comme un redshift dû à des mouvements propres s’éloignant de nous.
Les « z » sont alors négatifs ou positifs, mais avec des valeurs absolues bien plus petites que 1, ce qui signifie des vitesses propres n’excédant pas quelques centaines de km/s. Dès qu’on mesure le redshift des galaxies hors du Groupe Local (donc au-delà d’un rayon de 4,5 millions d’années-lumière), on observe des valeurs de « z » toujours positives et croissant vers 1 et bien au-delà (dépassant 13 pour les galaxies les plus lointaines!), donc déjà des vitesses dépassant 60% de la vitesse de la lumière et des distances dépassant les 8 milliards d’années-lumière (valeurs déjà atteintes pour z = 1). Cet effet est entièrement dû à l’expansion cosmologique, les éventuels mouvements propres devenant ici tout à fait négligeables.
oui impressionnant ! comme un ballon qui s apprete a exploser !!!
Avez vous connaissance du redshift de SN1987A AVANT explosion puis APRES:a l epoque j avais suivi cela et il me semble me souvenir que l on etait passe d un redshift a un blueshift ? Ce qui parait logique de part la perte de masse due a l explosion et a la « decourbure » de l espace temps qui s en est suivi ?
Le Grand Nuage de Magellan dans lequel se trouve SN1987A est une galaxie satellite de la Voie Lactée et possède une vitesse propre d’environ +300 km/s avec donc un z positif.
SN 1987A montre des anneaux de matières éjectée qui progressent à 7000 km/s, donc leur lumière a un blueshift.
oui
mais au juste au risque de vous ennuyer quelle est votre vision de l evolution de la courbure de l espace temps depuis le bigbang jusqu a maintenant ?
Il existe un paramètre de densité, noté Ω, un nombre pur dont, théoriquement, la valeur peut être plus grande, ou égale ou plus petite que un, correspondant à une courbure positive, ou nulle, ou négative de l’espace-temps. Actuellement, on a la fourchette expérimentale suivante : -0,0029 < 1 – Ω < +0,008 qui pourra encore s’affiner avec les résultats futurs de JWST.
Cette différence, 1 – Ω, est aussi notée Ωk, cet indice k indiquant la courbure. Les trois conditions de courbure ci-dessus peuvent aussi s’exprimer ainsi :
Ωk 0. On voit ci-dessus que l’on est très proche de 0 avec une très faible tendance pour une courbure positive, c-à-d. un Ωk négatif, c-à-d aussi un Ω un rien plus grand que un. La « meilleure » hypothèse est donc que Ωk a toujours été négatif, mais de moins en moins et donc que la courbure diminue avec temps. Aujourd’hui on serait quasiment arrivé à un Univers « plat », euclidien. La courbure positive diminuerait avec l’expansion, mai resterait positive.
Toutes ces considérations sont pour une forme locale de l’Univers, au niveau global, l’expérience est impossible, car on ne peut et on ne pourra jamais plus rien voir au-delà du rayon de Hubble actuel, soit quelque 14 milliards d’années-lumière. L’Univers est certainement bien plus grand, mais on ne peut rien savoir de sa courbure globale. Cela se ramène aussi au dilemme, déjà maintes fois évoqué ici, de savoir si l’Univers est fini ou infini. S’il est fini, alors sa courbure est positive, sinon elle peut être nulle ou négative. On ne peut pas trancher au niveau global, mais seulement, peut-être demain, au niveau local.
Correction :
Il manque un 0, donc bien lire : » on a la fourchette expérimentale suivante : -0,0029 < 1 – Ω et < !
.
Je reprends ici la phrase, en espérant que ces inégalités vont apparaître correctement :
.
" Cette différence, 1 – Ω, est aussi notée Ωk, cet indice k indiquant la courbure. Les trois conditions de courbure ci-dessus peuvent aussi s’exprimer ainsi :
.
Ωk 0. »
.
Pour compléter, j’ajoute une valeur plus précise, plus resserrée, trouvée entre-temps :
.
Ωk = -0,011 (avec une fourchette entre -0,023 et +0,002) , ce qui fonde un peu plus l’hypothèse d’une courbure positive, quoique extrêmement faible, et donc d’un rayon de courbure énorme…
Remarque : je constate que les symboles d’inégalité ne passent toujours pas correctement …
Insistons pourtant avec d’autres symboles :
«
Il manque un 0, donc bien lire :
« on a la fourchette expérimentale suivante : -0,0029 ‹ 1 – Ω ‹ +0,0008 … »
»
et
«
« Cette différence, 1 – Ω, est aussi notée Ωk, cet indice k indiquant la courbure. Les trois conditions de courbure ci-dessus peuvent aussi s’exprimer ainsi :
Ωk ‹ 0,
Ωk = 0,
Ωk › 0. »
»
Bonjour
Oui c est tres interressant car cela semble signifier que l espace temps qui reste une donnee mathematique presente des facultes de courbure ou de decourbure en fin de compte ce qui entre dans le domaine de la physique non ou je me trompe?
L’espace-temps est déformé, plus précisément courbé au voisinage de toute masse, étoile ou trou noir, cas extrême où il y a même fermeture complète ! Il y a contraction des distances et dilatation du temps. Ce ne sont plus que des « données mathématiques », mais ce sont désormais des données expérimentales de l’astrophysique et donc de la physique, telles que prévues par Einstein dans la théorie de la relativité générale.
oui mais finalement actuellement nous ne connaissons que deux parametres qui influent sur le continuum espace temps : la masse et une violente explosion qui ride celui ci sous forme d ondes gravitationnelles qui apparemment s amortissent vite ;
@Christophe de Reyff
Dans ce blog on a déjà mentionné l’antropie de l’univers, qui diminue avec le temps et l’éloignement des galaxies, donc de leurs masses, qui conduirait à la contractions de l’univers (Penrose).
https://en.m.wikipedia.org/wiki/Big_Crunch
Physicist Roger Penrose advanced a general relativity-based theory called the conformal cyclic cosmology in which the universe expands until all the matter decays and is turned to light. Since nothing in the universe would have any time or distance scale associated with it, it becomes identical with the Big Bang (resulting in a type of Big Crunch which becomes the next Big Bang, thus starting the next cycle).[21] Penrose and Gurzadyan suggested that signatures of conformal cyclic cosmology could potentially be found in the cosmic microwave background; as of 2020, these have not been detected.
ℚ𝕦𝕖𝕤𝕥𝕚𝕠𝕟 𝕕𝕦 𝕟é𝕠𝕡𝕙𝕪𝕥𝕖: ℂ𝕖𝕥𝕥𝕖 𝕟𝕠𝕥𝕚𝕠𝕟 𝕕’𝕒𝕟𝕥𝕣𝕠𝕡𝕚𝕖 𝕒-𝕥-𝕖𝕝𝕝𝕖 𝕦𝕟 𝕝𝕚𝕖𝕟 𝕒𝕧𝕖𝕔 𝕝𝕒 𝕔𝕠𝕦𝕣𝕓𝕦𝕣𝕖 𝕕𝕖 𝕝’𝕖𝕤𝕡𝕒𝕔𝕖 𝕥𝕖𝕞𝕡𝕤?
Merci car perdu avec ces notions complexes, mais tellement intéressantes.
Non, l’entropie croît inéluctablement avec le temps qui passe et donc avec l’expansion de l’Univers. Le 2e Principe de la thermodynamique prescrit que l’entropie ne peut que croître globalement, même si, localement, elle peut décroître dans un système ouvert alors qu’elle croît davantage à l’extérieur de ce système, ce qui surcompense cette décroissance locale. L’entropie de l’Univers était très basse au Big Bang et n’a fait que croître, surtout dans les phases primitives de l’Univers, et continue de croître. Une cosmologie cyclique n’est pas envisageable en disant que l’entropie decroîtrait, elle continuerait de croître, d’un cycle à l’autre. Mais on n’a trouvé aucune trace à ce jour d’un ou de cycles passé. Les cosmologies cycliques ou périodiques ne sont imaginées, tout comme les univers parallèles et autres multivers, que pour éviter de devoir envisager un commencement absolu au temps et donc à l’Univers.
Pour ceux qui seraient intéressés par les conférences de la cité des sciences retransmises sur internet:
https://www.cite-sciences.fr/fr/au-programme/activites-spectacles/conferences/humains-dans-lespace
notamment _Mars : retours de missions (Samedi 11 novembre de 16h à 18h). Certains sujets vont faire bondir ceux qui refusent de rêver!
Plusieurs thèmes souvent évoqués par monsieur Brisson mais dans l’espace un peu plus proche que l’univers lointain.
Samedi 21 octobre à 16h
Mardi 7 novembre à 18h30
Samedi 25 novembre à 16h
Samedi 16 décembre à 16h
Samedi 6 janvier 2024 à 16h
Très intéressant, Merci pour l’information.
Nous parlions ci-dessus de courbure, positive, nulle ou négative. Il est intéressant de se faire une idée quantitative de l’éventuel rayon de courbure correspondant à envisager dans le cas où Ωk ‹ 0, donc pour une courbure positive. On a vu qu’il est possible d’envisager une valeur négative Ωk = -0,011 (avec une fourchette entre -0,023 et +0,002). Une formule simple relie le rayon de courbure R(c) au rayon de Hubble R(H), soit le rayon de la sphère de Hubble (une distance où la vitesse d’expansion de l’Univers franchit la valeur c), ce R(H) étant par définition égal à c/H°, la vitesse de la lumière divisée par la constante de Hubble (c-à-d. le paramètre de Hubble actuel), H°, qui vaut environ 67,8 km/s/Mpc, avec le mégaparsec (Mpc), l’unité de longueur favorite des cosmologistes, valant 3,26 millions d’années-lumière, soit aussi 30,9 10^18 km.
Ainsi R(H) vaut 4’425 Mpc, soit environ 14,4 milliards d’années-lumière, et la sphère de Hubble a un volume de 10^31 années-lumière^3, soit aussi 10^79 m^3.
La formule simple est : R(c) = R(H)/racine carrée(|Ωk|).
Avec Ωk = -0,023, R(c) = 95 milliards d’années-lumière et avec Ωk = -0,011, R(c) = 138 milliards d’années-lumière ! Avec une valeur encore plus faible que l’on trouve aussi : Ωk = -0,0029, on aurait R(c) = 267 milliards d’années-lumière !
Plus on se rapproche de Ωk = 0 (espace plat euclidien), plus le rayon de courbure devient grand pour tendre mathématiquement vers l’infini. Un « tour » d’Univers ferait donc entre 597 et 1678 milliards d’années-lumière ; mais il n’y a pas de bornes, de limites, de frontières ; cela signifie seulement que, si un rayon de lumière ou une fusée partaient « tout droit », ils pourraient revenir à leur point de départ après avoir parcouru un tel tour… Pour un rayon de lumière, ces chiffres correspondent aussi au temps de voyage mesuré par nous.
Ce n’est donc pas demain que l’on va pouvoir observer (à deux endroits opposée de la voûte céleste, comme certains l’ont proposé) le même objet astronomique le plus lointain de nous, situé « aux antipodes ». Cela ne serait possible aujourd’hui que si le rayon de courbure n’était que de 4,4 milliards d’années-lumière et que l’objet soit situé aux antipodes, à 13,8 milliards d’années-lumière de distance parcourue de nous.
Intéressant calcul, Monsieur de Reyff. Mais je me pose une question: du fait de l’expansion de l’Univers, le rayon de lumière pourrait-il jamais (même théoriquement) revenir à l’endroit d’où il est parti « en ligne droite »?
Oui, l’expansion, et d’autant plus accélérée, signifie augmentation du rayon de courbure et donc de la longueur du « tour » qui deviendrait de plus en plus long, éloignant à tout jamais cette perspective d’un retour au point de départ.
Et que se passera-t-il lorsque la vitesse d’expansion, de plus en plus accélérée, atteindra la vitesse de la lumière?
L’expansion atteint déjà la vitesse de la lumière à la distance correspondant au rayon de Hubble. Le paramètre de Hubble étant le quotient d’une vitesse par une distance, si le mouvement est accéléré, la distance croît plus vite que la vitesse et donc le quotient diminue avec le temps. De fait, H va bien en diminuant et donc le rayon de Hubble croît et par là aussi le rayon de courbure selon la formule simple ci-dessus. Tôt ou tard tous les objets au-delà de notre Groupe Local de galaxies qui sont donc liées gravitationnellement vont sortir de notre horizon à la vitesse de la lumière, ce qui implique un espace qui se vide de matière autour de nous, plus aucun photon ne pouvant plus nous atteindre puisque la vitesse d’expansion dépassera leur vitesse. Le ciel, déjà noir du fait de la vitesse finie de la lumière (solution au paradoxe de Olbers), sera définitivement absolument noir.
Certes mais ce dont je voulais parler c’est du retour du signal. Du fait de l’expansion de plus en plus rapide de l’Univers, le signal (hypothétique) que l’on enverrait tout droit, ne pourrait jamais revenir jusqu’à nous en dépit de la courbure de l’espace, du fait de la finitude de la vitesse de la lumière. On aurait simplement un arc parcouru avant que la vitesse de l’expansion ne permette plus à la lumière d’avancer suffisamment (au moins du point de vue de l’observateur). Qu’en pensez-vous?
Oui ! Et je crois que même sans l’accélération, le fait-même de l’expansion empêche tout retour du signal à son point de départ qui se sera aussi déplacé. Seul un Univers statique le permettrait.