Une de mes épopées favorites, « Rama » d’Arthur Clarke, qui se déroule dans l’Espace profond, se termine dans le dernier tome Rama revealed par la magnifique mélopée de sa figure principale, Nicole, mourante, scandée par ses « je comprends », « I understand » : « I understand » that is the most important statement anyone can ever make…The whole key to life is understanding ». Je partage sans réserve ce sentiment et cette soif que la vie n’est jamais assez longue pour étancher. Quand on se tourne vers le Cosmos et que forcément on s’interroge, on n’obtient pas LA réponse mais inévitablement, il me semble, on veut connaître, on veut savoir et on veut comprendre. « Connaître » c’est rassembler le maximum d’information, « savoir » c’est intégrer cette connaissance dans son esprit, « comprendre » c’est relier ce savoir à tout ce qu’on sait déjà et l’utiliser pour aller plus loin dans la conscience de soi-même et du monde.
Par chance, notre époque, ou plus précisément celle que j’ai vécue jusqu’à ce jour, a été plus que toute autre auparavant, celle des « Grandes-découvertes » fondées sur des progrès technologiques extraordinaires et petit à petit assimilées par la population. Pensez donc ! Au début du XXème siècle, hier pour moi qui suis né en 1944, on ne savait pas qu’il y avait d’autres galaxies que notre Voie-Lactée, on pensait que l’Univers était statique et en matière de messagers de l’espace profond, on ne connaissait que la lumière. Par ailleurs, l’astronautique n’existait pas puisque l’aviation venait juste d’être inventée et que la Lune était toujours le plus proche mais néanmoins inaccessible astre des nuits.
Certains regrettent ces progrès, les déprécient ou les négligent, en refusant le noir et le froid de l’Espace, en s’en détournant et ne voulant que regarder frileusement la surface de la Terre et les foules qui la peuplent, rassurés par le contact, le bruit des voix, le chant de la Nature qui l’anime par ses multiples formes de vie. J’y suis sensible car la Terre, notre « pâle petit point bleu », est toujours (ou encore*) belle, douce et accueillante, car l’Espace est exigeant et effrayant par les dangers qu’il contient et qui pourraient écraser, sans aucun état d’âme ou plutôt « en toute inconscience », les faibles enveloppes corporelles qui nous matérialisent. Mais dans le ciel je vois avant tout les étoiles et toutes leurs promesses et je veux connaître, savoir et « comprendre » encore plus.
Les promesses ce sont celles d’« ailleurs » et de « lointains » bien sûr mais surtout de mystères ou, mieux, de questionnements scientifiques, petit à petit résolus et toujours plus profonds, d’explications obtenues sur les « pourquoi » et les « comment » par beaucoup de travail et de réflexion fondée sur une accumulation prodigieuse de connaissances et sur une intelligence rarement développée aussi loin dans d’autres domaines. Oui ! l’Espace est source infinie d’émerveillement et d’enrichissement intellectuel et il faut continuer à l’explorer pour aller toujours plus loin dans toutes les dimensions qui nous sont accessibles ou que petit à petit nous ouvrons, en y affectant le maximum de nos ressources, par ses deux modalités absolument complémentaires, l’astronomie et l’astronautique.
*selon l’endroit où l’on se situe sur l’échelle optimisme / pessimisme.
J’espère que parmi nos descendants, suffisamment d’entre eux toujours se passionneront afin que l’Aventure continue, pour aller beaucoup plus loin que cet éphémère « là-bas » où nous sommes parvenus. En attendant, vous qui vivez ce temps présent avec moi, restez à mes côtés, accompagnez-moi, aussi bien dans la contemplation que dans l’effort de la réflexion !
Illustration de titre : au cœur de la nébuleuse d’Orion, crédit NASA (télescope Hubble).
Pour retrouver dans ce blog un autre article sur un sujet qui vous intéresse, cliquez sur:
11 Responses
Je suis content que vous évoquiez la « saga » des « Rama » d’Arthur C. Clarke, que j’ai toujours considérée comme LE chef d’oeuvre absolu en matière de roman de science-fiction et que je recommande sans réserve à tous ceux qui s’intéressent à ce genre de littérature. Il se trouve d’ailleurs que, en convalescence après une intervention chirurgicale, je me suis tout récemment remis à la lecture des 4 tomes – « Rendezvous with Rama », « Rama II », « The Garden of Rama » et « Rama Revealed » (mentionné par M. Brisson) – avec toujours autant de plaisir qu’à la première lecture (je dois me raisonner pour « décrocher » et ne pas lire tout un tome d’une seule traite!).
Je partage, en amateur, votre intérêt pour l’astronomie, la compréhension de notre univers, sa découverte. Hormis la prouesse technique que je respecte, je ne partage toutefois pas votre enthousiasme pour le projet Starlink, qui est de mon point de vue animé d’un esprit purement commercial. Pour le reste, je vais continuer à lire chaque semaine, avec intérêt, vos informations sur l’espace.
Merci de votre intérêt.
Je précise que bien que je sois un ardent « supporteur » d’Elon Musk pour son projet martien mené avec son vaisseau Starship et son lanceur Superheavy, je suis tout à fait hostile à son opération Starlink.
Je ne regrette pas l’aspect commercial de cette opération (il faut bien qu’Elon Musk gagne de l’argent pour son projet martien) mais je déplore et je condamne la pollution tant physique que visuelle de l’espace proche qu’elle va causer. Je l’ai écrit à plusieurs reprises (voir mes articles sur Clearspace: « ClearSpace, une entreprise de salut public pour notre cognosphère » et « ClearSpace, start-up suisse romande, devient via ADRIOS une entreprise européenne indispensable ».
Bonjour,
Je vous remercie pour toutes les informations et réflexions que vous partagez.
J’apprécie beaucoup votre communication à propos de l’intérêt, la curiosité qui anime ceux qui s’intéressent à l’espace.
Je me suis senti réellement en osmose avec vous à la lecture de cet article.
Je ne possède pas de grandes compétences en astrophysique mais j’apprécie beaucoup le côté philosophique de cette matière.
Bien à vous
Le grand mathématicien allemand David Hilbert (1862-1943) est entre autres célèbre pour cette phrase : « Wir müssen wissen. Wir werden wissen — Nous devons savoir. Nous saurons » (1930), mise en épitaphe sur son tombeau. Elle se voulait une réponse à cet autre adage : « Ignoramus et ignorabimus — Nous ne savons pas et nous ne saurons pas » (1880) prononcé par Emil Heinrich Du Bois-Reymond (1818-1896). Mais depuis est arrivé l’Autrichien Kurt Gödel (1906-1978) qui a tranché la question : brièvement dit, il a montré qu’il y a des propositions indécidables dans son célèbre « théorème d’incomplétude ». Ce résultat va bien au-delà des seules mathématiques. Ce théorème montre que la pensée rationnelle n’est pas sans limites, il existe des problèmes qui ne pourront jamais être résolus. Bien plus, une hypothèse, une proposition peut être à la fois vraie et fausse, donc indécidable. On peut l’admettre ou la rejeter sans être en contradiction. C’est la base de l’indécidabilité. Il y a des situations où l’on ne peut pas démontrer qu’une hypothèse est vraie, mais où il est aussi impossible de démontrer sa fausseté. « Connaître – savoir – comprendre » trouvent là leur limite non pas provisoire, voire réformable un jour, mais absolument permanente et qu’on ne lèvera jamais.
Merci Monsieur de Reyff.
Certes, plus on avance dans la compréhension du monde et plus de questions se posent. Cependant il me semble que nous avons une marge énorme devant nous pour accroître cette compréhension, sans exclure, à chaque niveau, la presque imperceptible présence d’un doute. Sur un autre plan, dire qu' »à la limite » une proposition peut être à la fois vraie et fausse me fait penser à la nature quantique de la matière…ou du « vide » qui ne l’est sans doute pas vraiment. N’est ce pas étrange?
Bonjour,
Nous sommes de la même génération. Ce qui est important, et de suivre les préceptes d’Emmanuel Kant. Notre devise devrait toujours être « Ose penser par toi-même » ou tout simplement « Ose savoir ! ». Pour cela il est parfois nécessaire de s’extraire des sentiers battus et de notre vision étriquée. Les théories scientifiques nous permettent d’avoir une vision globale de l’Univers et de la matière, mais malheureusement ses concepts ne nous donnent pas la possibilité d’appréhender la vraie nature des choses. C’est la raison pour laquelle j’ai fait mon site.
Amicalement
Monsieur JPAJET,
Vos propositions sont très intéressantes, en particulier celles concernant :
– la conscience qui serait une imprégnation des règles et des lois d’une entité, le vide quantique ou vide, composant l’essentiel de toute matière,
– la bibliothèque du vide, une sorte de mémoire de toute la matière de l’Univers, vivante ou non, comparable à la mémoire de masse de l’ordinateur.
Je pourrais poursuivre vos hypothèses en disant que :
– cette bibliothèque du vide, soit de l’Univers, serait infinie dans l’espace et surtout dans le temps, donc éternelle, et elle contiendrait une sorte d’empreinte d’absolument tout ce qui a été formé, transformé dans la matière inerte et tout ce qui est apparu, a évolué ou disparu dans la matière vivante.
– ainsi, cette bibliothèque contiendrait, pour l’éternité, les âmes de tous les vivants de l’Univers, passés, présents et futurs, végétaux et animaux, y compris l’Homme avec son supplément d’esprit.
Enfin, je partage votre question : « Qui est cet architecte de génie et ce minutieux grand maître horloger ? »
Celui qui, à l’encontre de l’entropie naturelle de l’Univers, le transforme, par étapes, d’une façon progressive et organisée, dans un sens et un but pas encore compréhensible pour l’Homme.
Serait-ce Dieu, jouant aux dés, mais utilisant le hasard en le dirigeant au profit de l’édification de son Œuvre ? Car le hasard, seul, n’écrit pas de messages…
Indécidabilité et dualité ou complémentarité ne sont pas à confondre !
En mécanique quantique, on sait que l’aspect ondulatoire et l’aspect corpusculaire sont des caractéristiques complémentaires de la matière ou du rayonnement, aspects en relation de dualité, le continu et le discontinu (normalement incompatibles l’un avec l’autre) n’étant pas (ou plus) contradictoires. Il n’y a là rien d’indécidable !
Quant à la nature du vide, plein, effectivement, de particules virtuelles (susceptibles de se matérialiser, par exemple, aux confins de l’horizon d’un trou noir, comme l’a montré Hawking, ce « rayonnement » étant lié à l’évaporation lente et inéluctable de tout trou noir), il n’y a pas non plus de contradiction, car il s’agit de bien distinguer ce vide de l’espace, le vide quantique, riche de potentialités, du néant qui, par définition, n’existe pas (sinon par la pensée « in mente » et non pas « in re »). Pascal l’avait déjà bien précisé : « il y a autant de différence entre le néant et l’espace vide que de l’espace vide au corps matériel ; et qu’ainsi l’espace vide tient le milieu entre la matière et le néant … L’espace vide en apparence n’est plein d’aucune des matières qui tombent sous les sens, et qui sont connues dans la nature. » (lettre du 27 octobre 1647 au P. Etienne Noël).
Une des questions non décidables, par la science du moins, qui se pose et se posera toujours (dans le même sens des sept questions de Du Bois-Reymond), c’est pourquoi y a-t-il quelque chose et non pas rien.
Mais en faisant ces réflexions ultimes, j’en viens toujours à la remarque d’Einstein : le plus incompréhensible dans l’Univers c’est qu’il soit (ou puisse être) compréhensible.
FAKE NEWS?
NASA scientists detect evidence of parallel universe where time runs backward
https://nypost.com/2020/05/19/nasa-finds-evidence-of-parallel-universe-where-time-runs-backward-report/
Serge
Oui, fake news! Il est normal de percevoir, indirectement, les neutrinos semblant provenir de l’intérieur de la Terre. En effet ces particules interagissent extrêmement peu avec la matière et le seul moyen que l’on ait trouvé pour les observer, est de capter le passage de particules secondaires, très rares, les muons, résultant de leur passage au travers de beaucoup de matière, en l’occurrence la masse de la Terre.