EXPLORATION SPATIALE - LE BLOG DE PIERRE BRISSON

La Direction du Temps a décidé ce 3 mai de fermer son espace dédié aux blogs sur letemps.ch à compter du 30 juin. Ce blog que vous lisez va donc perdre son support et son cadre. Les articles déjà publiés et les commentaires resteront lisibles jusqu’à la fin de l’année 2023 à l’adresse https://www.letemps.ch/blogs .

Cette décision est le résultat de l’évolution de la politique éditoriale du média. Elle ne peut être discutée même si on peut la déplorer (ce qui est mon cas). Je laisse la Direction du Temps s’en expliquer auprès de vous, chers lecteurs, par un article dans le Journal, si elle le juge utile.

Le moment est donc venu de vous remercier de m’avoir accompagné pendant près de huit années, qui pour moi ont été merveilleuses, dans cette œuvre collective (mes articles, vos commentaires, nos échanges). Je me suis fait des amis, vous aussi sans doute, et nous formons aujourd’hui une grande famille. Comme dans toute famille les éléments constitutifs s’entendent plus ou moins bien mais comme ils partagent quand même des intérêts communs, ils ne peuvent s’empêcher de discuter à leurs propos, ce qui in fine devient un enrichissement pour tous.

Ce n’est pas parce que le Temps va nous couper la lumière que pour autant ma passion pour l’Espace, notre Univers, les questions fondamentales qui nous habitent tous (sans oublier « ma » toute petite planète Mars que je considère comme notre Porte vers l’Infini), va cesser de s’exprimer. Vous pourrez me retrouver sur le média en ligne contrepoints.org qui déjà me publiait de plus en plus souvent. Contrepoints est un journal libéral qui correspond très bien à mon orientation politique (que nul doute mes lecteurs attentifs ont bien remarquée). C’est un média important, le plus important dans son domaine avec plus de 2 millions de visiteurs uniques par mois et vous me retrouverez au milieu des meilleurs auteurs libéraux francophones de notre époque, ce dont je suis très fier.

Mes articles sont également publiés sur le site internet de la Mars Society Switzerland (adresse https://planete-mars-suisse.space/fr/blogs/blog-pierre-brisson ) mais je devrai faire un ajustement technique avant que cette page soit opérationnelle puisqu’elle est alimentée à partir des Blogs du Temps. Il existe une page « forum » sur ce site mais pour le moment les commentaires sous article ne fonctionnent pas (ce n’était pas nécessaire puisqu’il y avait le blog du Temps!). Sans doute vais-je passer par un blog WordPress personnel dont je vous communiquerai les coordonnées la semaine prochaine.

Continuons ensemble, jusqu’à Mars peut-être un jour! Mais d’ores et déjà, suivez moi sur Contrepoints.

Comme la plateforme des Blogs du Temps continue à fonctionner pour quelques semaines, je reprends le fil de mes articles. Cette semaine je vais encore vous parler du Starship car je n’ai pas fini de dire tout ce que je voulais à son propos.

La réutilisabilité des fusées conçue et réalisée par SpaceX a révolutionné le marché, et ça continue !

Imaginez que l’on jette les avions à la mer à chaque fois qu’on en utilise pour traverser l’Atlantique. C’est un peu ce qui se passait avant l’arrivée de SpaceX sur le marché et la mise en pratique de l’idée géniale d’Elon Musk de récupérer puis de réutiliser le lanceur (premier d’une fusée de deux, trois ou quatre étages).

Depuis les V2 allemands de la Seconde guerre mondiale et les années qui suivirent, une fusée lancée était une fusée perdue (non pour l’objet de sa mission mais pour ses éléments constitutifs). On était dans un contexte où la pollution était une notion inconnue, où l’on disposait d’autant de métal que l’on souhaitait et où les usines tournaient sans trop de problème d’approvisionnement en métaux ou ergols (carburant + comburant). Sur cette lancée, si l’on peut dire, les fusées américaines de la grande époque de la Conquête de la Lune (fin des année 60/début des années 70) étaient également jetables et elles donnaient satisfaction puisqu’on ne comptait pas les dollars dépensés (et qu’on jetait aussi à peu près tout).

L’euphorie des premiers succès passés, on se dit que, tout de même, on pourrait pour les seuls vols habités, faire des fusées comme des avions. Cela donna la navette spatiale, « the Shuttle », qui fut en service entre 1981 et jusqu’en 2011 (« retraite » un peu forcée après 135 vols, pour des raisons de sécurité). Cet avion-fusée rendit de grands services (ne serait-ce que le sauvetage du télescope Hubble !) mais il s’avéra coûter extrêmement cher en entretien. Il s’agissait notamment de réviser la totalité des tuiles de protection thermiques une à une après chaque vol. Et ce fut d’ailleurs un bloc de mousse de protection qui avait heurté une de ces tuiles au décollage qui provoqua la catastrophe de la navette Columbia (7 morts !).

Elon Musk, quand il lança ses premières fusées en 2010, était animé par l’Objectif Mars comme Tintin l’avait été par l’Objectif Lune. Et, sans aucun complexe (c’est un de ses traits de caractère) il voulut que sa fusée soit récupérable et réutilisable (il fallait évidemment qu’elle le soit pour revenir de Mars). Il commença ses lancements en 2006 et en 2015 il réussit sa première récupération (après plusieurs échecs ou demi-succès, mais on sait que c’est comme cela qu’il « fonctionne »). On était au 20ème vol et c’était un Falcon-9 (le seul lanceur dont la société disposait. Aujourd’hui SpaceX a lancé 217 Falcon-9 et Arianespace seulement 84 Arianes-5 (depuis 2006). Sur les 217 lancements, 175 lanceurs de Falcon-9 sont revenus se poser sur Terre et il y a eu 152 réutilisations. Il n’y a eu aucune récupération d’Ariane. La différence est claire et la conséquence de la différence c’est le coût, aggravé par le fait que moins on lance plus le lancement coûte cher puisqu’on fait moins d’économies d’échelle. Au bout du compte un lancement de Falcon-9 coûte moitié moins cher (67 millions de dollars) qu’un lancement d’Ariane-5. NB : Une autre fusée plus puissante de SpaceX, le Falcon-Heavy (poussée par 3 groupes de 9 moteurs Merlin), permet d’emporter des charges plus lourdes mais elle a été encore peu utilisée (6 lancements dont le dernier est intervenu ce 30 avril, un « sans-faute »).

Le deuxième étage du Falcon-9 n’était pas récupérable mais cela n’avait pas vraiment de sens pour plusieurs raisons.

Premièrement la combustion des ergols du premier étage se termine très rapidement (trois minutes dans le cas du Starship) car il s’agit de s’arracher de la gravité terrestre à partir d’une vitesse nulle et pour ce faire non seulement de gagner en vitesse mais aussi en altitude, le plus vite possible (avec le meilleur rapport ergols consommés/puissance délivrée). Après son utilisation, le premier étage se trouve donc, à la verticale, très proche de son site de lancement. Au contraire le deuxième étage va prendre de la vitesse essentiellement à l’horizontal, en prenant lentement de l’altitude en fonction de la vitesse qui le soustrait de plus en plus à la gravité. Il faudrait beaucoup d’ergols pour revenir sur le site de lancement, très éloigné, et à une vitesse initiale beaucoup plus élevée (peut-être pourrait-on le faire après une orbite complète ?).

Deuxièmement, le deuxième étage dans une fusée classique est un exhausteur d’altitude qui ne comporte ni beaucoup de métal (il est moins chargé en ergols), ni beaucoup de moteurs. Il est donc de ce fait moins intéressant à récupérer.

Troisièmement, toujours dans une fusée classique, le deuxième étage en porte un autre (un « inter-étage » ou, plus complexe, un module de service) qui lui-même en porte un autre (la capsule ou le satellite ou la sonde) même si l’expression « deuxième étage » est réservée exclusivement à l’exhausteur d’altitude. Le problème de la récupération est ainsi segmenté en plusieurs sous-problèmes. Si on lance un satellite, on ne va pas le récupérer ce qui ne sera pas le cas d’une capsule si elle porte des passagers. Quant au module de service, il peut aller très haut, très loin, à une distance où il ne sera pas plus récupérable que la sonde qu’il a lancée.

Pendant la mise en place chez SpaceX de l’innovation/révolution qui consistait à récupérer le premier étage, les institutionnels, NASA ou ESA, regardaient sans comprendre qu’ils étaient en train de perdre le marché, obnubilés par leur crainte que la fiabilité du lanceur récupéré ne serait jamais suffisante et par le fait que pour revenir se poser sur le sol terrestre, un lanceur devait utiliser entre 10 et 15% des ergols embarqués.

Vue l’évolution des coûts et donc des prix des lancements, vu également l’allongement du « track-record » positif de SpaceX, ces mêmes institutionnels finirent par se dire que cette réutilisation des lanceurs n’était peut-être pas une mauvaise idée. Mais le retard accumulé est considérable. A ce jour aucune fusée de la NASA construite par ULA (United Launch Alliance = Boeing + Lockheed Martin) n’est récupérable et l’ESA n’envisage la récupération/réutilisation que pour les années 30. D’ici là tout le marché, sauf protection très coûteuse, sera pris par SpaceX. C’est d’ailleurs presque déjà le cas sauf pour les lancements d’institutions ou de sociétés captives pour des raisons politiques (l’ESA utilise forcément les services d’Arianespace).

Mais Elon Musk voulait aller plus loin. Il voulait aller sur Mars et c’est pour cela qu’il décida de créer un lanceur lourd adapté pour ces missions lointaines avec un nouveau concept de deuxième étage qui devient un second étage inclusif des autres. Ce second étage fait en effet un bloc de tous les segments supérieurs de la fusée car il a besoin de conserver les différentes fonctions de ces éléments jusqu’au bout. Si l’on veut envoyer des hommes sur Mars, il faut s’organiser pour qu’ils puissent revenir et donc que le second étage qui va les emporter sur Mars puisse en revenir, en bon état, avec le minimum d’entretien sur place et qu’il puisse être approvisionné sur place en ergols pour bénéficier de l’énergie suffisante pour le voyage (moins que pour l’aller car la gravité martienne est nettement plus faible que la gravité terrestre). Par la même occasion, il faut que ce vaisseau spatial puisse revenir avec un module de propulsion type deuxième étage propulsif classique, avec un module de service classique pour assurer toutes sortes de fonctions nécessaires à l’habitat mais pas seulement (correctif d’attitude notamment) et avec un habitat. Il faut enfin qu’il puisse être récupéré et réutilisé afin de réduire les coûts. A noter qu’il est totalement exclu d’apporter sur Mars les ergols nécessaires au retour sur Terre car il faudrait doubler la masse qu’il conviendrait d’arracher à la gravité terrestre à l’aller (ergols suffisant pour repartir de Mars plus les réservoirs pouvant les contenir). Cela reviendrait à « trimbaler » avec soi un corps mort inutile pendant la moitié du voyage (qu’il faudrait en plus maintenir pendant deux ans à des conditions de températures particulièrement basses).

C’est ainsi donc qu’est né le concept de ce Starship et de son lanceur SuperHeavy dont on peut espérer que le second vol orbital, dans deux mois, soit plus long que le premier. Avec lui, le deuxième étage et les autres sont intégrées et la récupération rentre dans la fonction elle-même du vaisseau spatial.

Lire ici la très intéressante interview d’Elon Musk qui m’a été communiquée le 30 avril, par mon ami Jean-François P : https://twitter.com/ufotinik/status/1652644402534273025

Si le Starship peut voler, le concurrent, également conçu et fabriqué selon des principes traditionnels par ULA, nommé « SLS » (Space Launch System), celui qui a mené à bien la première mission Artemis autour de la Lune, deviendra complètement obsolète. En effet il n’aura pas une capacité d’emport comparable. Sa capsule, Orion a un volume pressurisé de 19,57 m3 dont un volume habitable de 9 m3 alors que le Starship aura un volume viabilisable de 1100 m3, habitable pour plus de 800 m3. Par ailleurs Orion serait totalement incapable de repartir de Mars après y être descendu. Il faudrait qu’il reste en orbite en étant assisté d’une annexe légère, comme l’était le module lunaire (« LEM ») du temps d’Apollo pour descendre sur Mars puis remonter à l’orbite. Inutile de dire que ses capacités d’emport ne pourraient être qu’extrêmement limitées en volume et en masse (2 personnes et quelques équipements, comme un rover plié pour les transporter). En second lieu le coût du SLS se monte à plus de 4 milliards de dollars alors que celui du Starship atteint juste le milliard. Bien sûr, cela est un coût initial et il baissera si l’on construit plusieurs fusées mais c’est mal parti pour le SLS étant donné qu’il n’est et ne sera jamais réutilisable.

Donc le SLS n’est qu’une solution provisoire en attendant que le Starship soit prêt. Quant à l’Europe/ESA, on en reparlera plus tard quand elle aura réussi aussi à faire son lanceur réutilisable. Mais pour le moment elle n’est définitivement pas dans la course et ne tiendra dans les années qui viennent, que parce que la différence de prix entre celui de sa fusée Ariane-6 et celui d’une Falcon-9 ou Heavy sera payée par les impôts des contribuables.

Illustration de titre :

Retour spectaculaire sur Terre de deux des trois corps de propulsion du Falcon-Heavy en avril 2019. Crédit SpaceX.

Pour (re)trouver dans ce blog un autre article sur un sujet qui vous intéresse, cliquez sur :

Index L’appel de Mars 23 04 20

23 Responses

  1. Cher Pierre,
    J’apprends avec déception que la rédaction du journal Le Temps a décidé de fermer son espace de blog. C’est regrettable et nous prive d’une plateforme bien coordonnée et interactive.
    Heureusement que nous pourrons continuer de suivre tes postes toujours pertinents et d’actualité par d’autres biais.

    Merci de tout cœur pour tout le travail déjà accompli et en route pour la suite !

  2. Bonjour Pierre,
    Vraiment dommage que ces blogs du Temps se terminent car ils sont intéressants, un des rares espaces libres d’expression francophone: surtout pour le vôtre qui me passionne.
    Heureux de pouvoir vous retrouver « sous d’autres cieux » pour continuer cette aventure passionnante (un peu l’écriture d’un nouveau Tintin « En route pour Mars »). 🙂
    Merci beaucoup pour votre contribution.

  3. je ne comprends pas la décision de la rédaction du « Temps » de fermer son espace blog. Celui-ci donnait une « valeur ajoutée » incontestable au site web de cette publication, avec de nombreux intervenants très intéressants proposant un éclairage original sur des sujets divers et donnant souvent des informations et/ou points de vue qu’on ne trouvait nulle part ailleurs (aux lecteurs ensuite d’en faire leur propre analyse).
    La suppression d’un des rares espaces encore existant qui permettait à tout un chacun de commenter et développer ses propres idées en un peu plus de 2 ou 3 lignes seulement (ce qui oblige alors souvent dans ce dernier cas à les présenter de façon caricaturale et manquant de nuance) est très regrettable dans un pays où l’opinion citoyenne a une importance particulière du fait de notre système de démocratie directe (mais encore faut-il lui donner l’occasion de pouvoir s’exprimer, et cela ne se fait pas seulement dans les urnes mais également en amont, … ou dans un cadre différent). J’ose espérer que cette décision du « Temps » n’est pas irrévocable et qu’il reste encore une possibilité de la voir abrogée.

    1. Cher P-A, j’ai de suite contacté le Chef d’édition numérique chez Le Temps pour lui faire part de nos regrets (il nous lit).

  4. En ce qui concerne le sujet de ce jour, la « révolution Starship », l’avenir dira si Elon Musk aura été un visionnaire, développant LE système de transport spatial des prochaines décennies, ou alors un utopiste s’étant engagé dans une impasse. Pour l’instant, il reste encore au Starship à faire ses preuves, Certes, les promesses faites à son sujet sont très alléchantes, mais elles rappellent assez celles qui avaient été formulées en leur temps pour la navette spatiale US et qui n’ont au final guère été tenues. Personnellement, je crois a priori plus à l’approche modulaire dans le domaine spatial (qui n’exclut nullement la réutilisabilité), qui vise une utilisation plus rationnelle, plus optimisée et plus flexible (adaptable) des différents éléments du système, qu’à l’approche « tout-en-un » suivie par SpaceX qui, entre autres, ne permet guère de prévoir des « plans B » en cas de problèmes, « ça passe ou ça casse »! Un couteau suisse est intéressant en pique-nique, mais aucun des outils (couteau, ciseaux, tournevis, scie, …) qu’il propose ne fournit un service optimal dans des cadres d’utilisation plus spécifiques, … et c’est un « bon Suisse » qui le dit! 🙂

    1. Comme j’ai déjà eu l’occasion de l’écrire, je confirme entièrement pour la Navette. L’essentiel de ce qui est aujourd’hui promis pour le Starship l’avait été pour elle en son temps. Le coût de l’espace serait divisé par dix, la routine menaçait …

    2. Parfaitement dit je plussoie!
      Merci et regrettable la fermeture du blog du temps car cela était un bel espace d’échange

    3. @Pierre-André Haldi. Vous ne semblez pas identifier les différences entre la navette et le Starship. La réutilisation du Starship est un but, mai sn’ets absolument pas nécessaire au succès de ce lanceur. Ce que très peu de personnes semblent imaginer, c’est que le starship offre une avancée certaine même sans la capacité de réutilisation de par sa simplicité (structure en métal bon marché, production à la chaîne conçue dès l’origine du projet, construction intégrée, carburant facile à manipuler,…). Un starship dans un version à usage unique et qui couterait moins de 200 millions de $ par vol permettrait déjà une réduction appréciable du coût d’envoi vers l’orbite basse. La capacité de récupérer la partie supérieure voir le booster ne sont absolument pas une nécessité pour permettre de démarrer une explotation commerciale. Si on considère que SpaceX a construit déjà 2 pas de lancement (Boca Chica et Kennedy Space center), et prévoit un 3ème à Boca Chica, c’est bien une stratégie de non-réutilisation mais de vols multiples qui se profile à court terme.
      De plus, le Starship dans sa version terrestre ne vise absolument pas le vol habité comme premier objectif, SpaceX visant principalement l’envoi de satellites pour sa constellation comme moteur économique devant permettre la fiabilisation à moyen terme.
      Contrairement à la navette qui avait des objectifs très élévés et qui ne pouvait pas se permettre de ne pas les atteindre (la Nasa n’ayant pas de solution de rechange), le Starship peut se développer par étape.
      Le Starship ne permettra pas d’atteindre le rêve martien de Musk, ce vaisseau n’étant pas tailler pour le vol interplanétaire, mais si il permet de diviser par 2 le coût d’envoi en orbite basse, il aura atteint le minimum et permettra de révolutionner le vol spacial.

      1. @ Crerat

        Je pense que ce qu’a voulu dire P-A. Haldi est que les promesses de réduction radicale de coût faites aujourd’hui pour le Starship ressemblent à celles en son temps pour la Navette spatiale. Si c’est ainsi, c’est parfaitement exact.

        Autre similitude, j’ignore si le Starship « vise » ou non le vol habité (il semble il y avoir les deux), mais à l’époque de sa conception, la Navette n’était pas présentée comme servant à faire des vols habités. Elle était d’abord promue comme un mode plus économique d’envoi de satellites, et ce fut son usage quasi unique jusqu’à l’accident de Challenger. Elle a ensuite servi à la construction de l’ISS. Pour ces deux missions, l’homme à bord était un moyen, non la finalité.

        Seule différence à un demi siècle d’intervalle entre Navette et Starship : personne n’a prétendu que la première irait sur Mars. A ce sujet, je suis surpris de lire que le second ne le permettra pas non plus, ou ne réalisera en tout cas pas le « rêve martien » d’E. Musk : même si je l’ai toujours pensé, c’est plutôt le contraire que j’ai jusqu’ici entendu de l’intéressé ou vu dans ses clips vidéo. Un train m’a-t-il échappé ?

  5. La décision du Temps est regrettable et j’attends avec impatience les explications de la direction que je respecterai, mais avec un peu d’amertume. Mes commentaires ont été parfois refusés par d’autre blogs du Temps et je le comprends aisément; pourtant, j’ai toujours pris soin de ne jamais passer les bornes. Cependant, M. Pierre Brisson a toujours publié mes modestes commentaires et je l’en remercie vivement. Je viens de découvrir https://www.contrepoints.org/, en espérant que les articles de M. Pierre Brisson y soient publiés. Je saisis l’occasion pour attirer votre attention sur le site https://www.quantamagazine.org/. Il traite aussi de sciences mais sous un aspect plus théorique.

  6. Merci à vous, M. Brisson, pour nous avoir fait partager votre passion, ainsi qu’à tous les contributeurs du forum, qui ont également contribué à en éclairer les différents aspects. Rarement de votre avis sur les aspects sociétaux, j’ai néanmoins beaucoup appris, et regretterai cet espace d’information et de confrontation des avis et des idées.

  7. Un lanceur « probablement » prêt dans 8 semaines, « pas vu la preuve » de dommages au décollage, pas d’atteintes « à notre connaissance » sur l’environnement, 3 moteurs qu’on a « choisi de ne pas démarrer » : on comprend qu’E. Musk n’aie pas envie d’être trop précis, mais son interview fait tout de même langue de bois.

    Quant à l’impact sur Artémis III, seul contrat (sérieux) du Starship à ce jour, on se contentera de ne « pas s’attendre » à ce que l’HLS en soit « l’élément le plus en retard ». Contrat qui, rappelons-le, prévoyait sa répétition complète automatique … cette année.

    Dont acte pour l’admission de ce retard. Pour le reste, souhaitons justification à cet optimisme néanmoins prudent

  8. Bien sûr, la réutilisabilité est une propriété indispensable pour rentabiliser des vaisseaux spatiaux. Tournesol l’avait compris un demi siècle avant Elon Musk.
    Avant même d’être un homme d’affaires talentueux, Elon Musk est un scientifique éclectique. Peu lui importe que ces idées paraissent farfelues à certains, s’il les juge juste, il les applique. Même si son calendrier sera un peu plus long que prévu, il ira sur Mars et probablement ailleurs.

    En supprimant les blogs, Le Temps scie la branche sur laquelle il est assis. Il a choisi le meilleur moyen pour perdre des lecteurs.

    Soyez sûr, Monsieur Brison, que je continuerai à vous lire où que vous soyez et que je ne serai pas le seul. L’internet offre à tout créateur d’idées toutes les possibilités de les faire connaître et il n’est pas nécessaire pour cela d’utiliser ces réseaux prétendus sociaux. Un blog médiatisé par des YouTubeurs enthousiastes est une solution efficace. Dans le domaine du génie civil, martisa.ch en est un bon exemple; mettez marti dans le moteur de recherche de YouTube. Sans oublier les autres quotidiens. Pour information, les trois principaux quotidiens de la Côte Est des USA sont très ouverts et offrent des abonnements à $0,5/semaine (CHF23/année).

    Et pourquoi pas, quelques fois par année, une rencontre en présentiel avec vos blogueurs les plus fidèles ? L’Europe n’est pas si grande que ça.

  9. Triste d’apprendre que votre blog ne sera plus accessible depuis mon journal LeTemps. Je n’en connais pas les raisons et espère qu’elles nous seront expliquées de façon convaincante.
    J’ai pris note de votre nouvelle adresse, car ces nouvelles de l’univers, des techniques de son exploration et des informations qu’elle nous livre et va nous livrer dans le futur seront probablement utile à nous terriens qui vont devoir affronter les changements physiques, chimiques et biologiques de la zone d’habilité dans laquelle se situe notre planète.
    .
    Les multiples découvertes en astrobiologie (de Mercure à Pluton et les différentes lunes souvent associées) ont été rendues possibles grâce à ces ingénieurs et physiciens de talent. La vie ou du moins ses prémisses, ses composants et ses mécanismes semblent présent partout dans l’univers (voir Nathalie Cabrol). J’ose espérer que la direction du journal LeTemps n’aura pas négligé cette composante scientifique non négligeable.
    .
    Au plaisir de pouvoir continuer à vous lire

  10. C’est vrai que la fermeture de ce blog est une grande déception pour ceux qui y ont participé. La présentation claire et ordonnée, la liberté des opinions tolérées par monsieur Brisson et, bien sûr, les sujets abordés me faisaient me sentir concerné par cette page. Loin des plaisanteries sans intérêt lancées par des lecteurs de certains journaux francophones chez qui le laconisme, le ton rigolard cachent le manque d’idées. Je pense aussi que le journal Le Temps est conscient de la nécessité vitale de s’installer ailleurs que sur terre. Le contraire serait tresser la corde pour être pendu. Oui, on peut considérer que mars est plus intéressant que la lune. Mais l’avenir commence à se dessiner et il faut suivre un ordre raisonnable. Nous apprendrons sur la lune bien des techniques qui rendront la conquête de mars plus sécurisée et plus facile. Intensifier l’exploration lunaire sera source d’enrichissement à bien des points de vue. Et vivement que l’Europe s’y mette, l’émulation stimulera peut-être les prises de conscience

  11. Imaginons qu’un jour il existe réellement une volonté de faire des vols habités vers des destinations lointaines, cela n’a pas de sens d’employer pour ce faire un engin qui doit décoller et atterrir à chaque voyage. La quantité de matériel pour le voyage (pour Mars l’aller-retour prend 2 ans), l’ensemble des compétences nécessaires à l’équipage implique une équipe étoffée (peut-être un peu moins à l’avenir avec l’IA)… Tout ce poids doit encore être multiplié par beaucoup de carburant et de comburant. Bref, tant qu’à faire du réutilisable, autant limiter les lancements et prévoir un vaisseau spatial destiné à aller d’une orbite à une autre et retour. Ce vaisseau est un peu comme une station spatiale en mieux. Un lanceur lourd comme spaceX a toute sa place pour permettre le montage en orbite d’un tel vaisseau car il faudra y arrimer un engin capable de se poser et de redécoller de la planète de destination.

  12. Le but fondamental étant d’éviter que l’humanité disparaisse de l’univers, l’expression « Imaginons qu’un jour » devrait être remplacée par « lorsque nous ». Le soleil doit nous trahir dans 5 milliards d’années mais il me semble qu’il faut faire des voyages spatiaux bien avant pour échapper à d’autres catastrophes. Il faudra de très grands vaisseaux. Espérons que nous trouverons sur la lune, puis sur mars les quantités de minerais nécessaires pour les fusées et les usines qui les construiront. Tentez d’être optimiste!

    1. Il se trouve que mon métier n’est pas de faire rêver, mais de dire le possible et de contribuer à le réaliser. Une manière concrète de faire avancer le schmilblick. Dans mon domaine, j’ose me vanter d’être parmi les audacieux, voire créatifs. Les objectifs que vous fixez aux programmes spatiaux sont tout, sauf officiels.
      Mon audace irait même jusqu’à souhaiter une révolution dans l’industrie spatiale européenne, car l’Europe fait un trekking avec un caillou dans la chaussure. La judiciarisation des relations entre entreprises et la main mise des responsables qualité qui l’accompagne tue d’emblée toute audace. Je serais aussi prêt à considérer le modèle de Janus qui promet un univers parallèle où la masse est négative avec des constantes physiques différentes, permettant une vitesse de la lumière 5x plus rapide. Mais là aussi, les mandarins boycottent carrément.

  13. Méfiez-vous de la science-fiction elle a tendance à se réaliser, demandez à Jules. « Les hommes sont forts quand ils ont des idées fortes » écrivait un psychanalyste. L’idée de voyager dans l’espace est une idée forte vu les dépenses, l’esprit de compétition sans parler de la littérature, des feuilletons. Les idées fortes exigent leur réalisation même quand elles sont d’apparence impossible. Le second élément est la pression des évènements. Celle-ci est peut-être déjà là: peur du réchauffement, vague rêve d’une autre terre, peur de la bombe. Le troisième élément est l’amour de l’aventure, l’envie de trouver autre chose, de faire quelque chose. Il est inhérent à la pensée de l’homme depuis des millions d’années. Sans lui nous serions tous en Afrique aujourd’hui. Il fait que nous accumulons de nouvelles connaissances dans des domaines parallèles (informatique, physique, médecine, pédagogie…). Cela nous donne un sentiment de puissance qui nous conduit à tenter l’impossible, à attaquer l’Everest même sans espoir. Le quatrième élément et non des moindres est dans quel futur? lointain ou proche? Pas sûr que ce soit nécessaire de préciser ce point: ça arrivera quand ça arrivera. Il faut avancer c’est tout. Et notre génération doit apporter sa pierre. Vivre dans le rêve nous fait agir, c’est comme ça qu’on a construit l’Amérique.

    1. « Méfiez-vous de la science-fiction elle a tendance à se réaliser, demandez à Jules. »

      S’il est vrai qu’on fait souvent de « Jules » (de son vrai nom Jules Gabriel Verne) un chantre de la modernité, son enthousiasme pour les prouesses techniques n’est-il pas toujours tempéré par un pessimisme de fond concernant les dégâts du progrès? Comment penser l’ambiguïté de la modernité chez lui? Un voyage au centre de son univers fictif ne révèle-t-il pas en constante opposition des héros et antihéros, des lieux, des objets et des machines bénéfiques ou maléfiques? Ses personnages et ses intrigues ne revêtent-ils pas une dimension mythologique centrée sur les figures de Prométhée et de Faust? Sous les intrigues et les figures, ne décèle-t-on pas les schèmes élémentaires d’involution et d’explosion qui dynamisent l’imaginaire des « Voyages extraordinaires » et que traduit l’opposition de la coquille et du volcan?

      Nemo, Grant, Hatteras, Grant, Robur, Mathias Sandorf ou Servadac ne sont-ils pas plus parents de Hamlet, de Don Quichotte, de Werther, du Holden Caulfield de « The Catcher in the Rye » et de l’Ulysse de Joyce que des héros cornéliens?

      Verne est-il un auteur de science-fiction ou plutôt d’anticipation socio-politique : ne décrit-il pas, en visionnaire, l’ambiguïté de notre modernité que bien des philosophes du XXe siècle tenteront de conceptualiser?

  14. On comprend pourquoi Jules Verne est un grand auteur. Son œuvre peut être vécue sous plusieurs aspects. On peut retenir la psychologie des ou d’un personnage, son importance par rapport aux autres héros, les inter-relations voire la hiérarchie. On peut aussi s’attacher à l’ambiance qu’il imagine selon le contexte plus ou moins futuriste, plus ou moins possible, indépendamment des personnages. Bref sa vision du futur dans le livre en cause. Passer son temps à se demander si c’est un futur possible (Servadac et son météore!). On peut admirer le côté livre d’aventures avec de multiples rebondissements, des coups de théâtre quasi picaresques parfois. « enthousiasme pour les prouesses techniques » / « tempéré par un pessimisme de fond concernant les dégâts du progrès? ». J’admets que je peux être aveuglé par mon admiration pour les progrès spatiaux. Mais la vérité comme me l’a enseignée mon prof de philo autrefois, c’est que rien n’est ni totalement bon ni totalement mauvais. Le progrès technique comme tout. Le yin et le yang, pour certains. Cette « constante opposition » c’est la vie mais vous colorez les choses en fonction de votre pensée personnelle, ce qui est d’ailleurs totalement respectable

  15. Chère et Cher blogueur du Temps,

    J’apprends comme vous que la plateforme va fermer.

    Même si nous ne pouvons guère agir sur cette décision, il me semble capital de demander au journal de maintenir une archive en ligne.

    En effet, s’il est possible de déplacer un blog techniquement, il reste très délicat d’effacer une archive qui sert d’outils pour notre communauté, nos articles pouvant être cités par ailleurs.
    Mes articles circulent notamment dans des communautés en santé mentale, et aucun référencement ne pourrait aujourd’hui leur permettre une visibilité équivalente via un moteur de recherche.

    Il serait dans mon cas insensé que les articles publiés depuis plusieurs années soient déplacés sur une autre plateforme.

    C’est très important de demander au Temps de maintenir une archive visible et consultable.
    Je propose de rédiger un courrier à plusieurs pour faire une demande groupée dans ce sens.

    Bien à vous
    Caroline Bernard
    Démesurer
    https://blogs.letemps.ch/caroline-bernard/
    Me contacter
    caroline@cheminsdetraverse.net

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À propos de ce blog

Pierre Brisson, président de la Mars Society Switzerland, membre du comité directeur de l’Association Planète Mars (France), économiste de formation (University of Virginia), ancien banquier d’entreprises de profession, planétologue depuis toujours

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